Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre
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Les Arrageois sous les obus en juin et juillet 1915
Depuis le 6 octobre 1914, Arras est bombardée sans relâche par les Allemands. Une bonne partie de la population a quitté la ville au milieu de l’année 1915 pour s’exiler dans des zones plus sûres, après la destruction de leur maison. Mais les journées sont longues pour ceux qui restent car, entre chaque bombardement, ils doivent réparer ce qui peut l’être, surveiller les maisons abandonnées, aider au transport des blessés ou encore à éteindre les incendies. D’autres préparent des valises de vêtements qu’ils envoient aux membres exilés de leurs familles, mais tous tiennent, persuadés que leur ville ne sera jamais prise par l’ennemi.
La journée terrible du 26 juin 1915
À la fin juin 1915, les obus pleuvent avec force sur la ville, certains Arrageois diront même que les bombardements d’octobre n’étaient rien en comparaison de ceux de juin et de juillet 1915. Dans son ouvrage Arras sous les obus, l’abbé Foulon restitue une page d’un journal, qui raconte la dure journée du 26 juin 1915 :
26 juin
La nuit a été calme mais la journée a été terrible […]. À partir de quatre heure trente du matin, une véritable grêle de fer et de feu s’est abattue sur la pauvre cité, sans un instant de répit jusqu’à une heure quinze […]. Les projectiles se suivaient sans interruption. On eût cru que les Allemands voulaient en finir avec la ville […]. Nos pièces répondaient, guidées dans leurs tirs par un avion qui planait au milieu ou au-dessus de l’avalanche de feu.
À deux heures, le calme est complet. Tout Arras sort de ses caves […]. On apprend qu’il y a eu de tous côtés de terribles dégâts. La cathédrale, le Palais Saint-Vaast ont été fort éprouvés. L’ancien petit séminaire a reçu pour sa part, plus de quatre-mille obus […]. Sur toute une partie de la rue de Baudimont, on ne trouve plus une maison avec son toit. La rue est complètement obstruée. Le plus terrible, c’est que des incendies ont été allumés et qu’il a été impossible de les combattre. […] Le tableau qu’offre la ville est navrant : on se croirait au lendemain d’un cataclysme épouvantable, cyclone ou tremblement de terre.
Il y a encore eu malheureusement des victimes […]. Cependant le moral des habitants n’est pas aussi abattu qu’on serait tenté de le croire. On entend déjà frapper du marteau. Certains dégagent les décombres devant leur porte. Quelques réflexions semblent pourtant découragées : "[…] autant partir, notre tour viendra". On dit que la Préfecture va faire de nouvelles offres aux civils qui voudraient quitter la ville […]. Des officiers ont évalué à 15 000 le nombre de projectiles de toutes sortes jetés sur Arras en cette seule journée.
Le soir, quand ils se couchent pour essayer de dormir, les habitants d’Arras ont encore dans les oreilles le sifflement des obus, comme après un long voyage en chemin de fer on croit entendre le roulement des wagons sur les rails.
Abbé E. Foulon, Arras sous les obus, Paris, Bloud et Gay, 1915. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHB 735.
Guerre universelle. Arras. Rue des Bouchers-de-Cité, n° 26, 28 et 30 (bombardement du 26 juin 1915). Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 1480.
Guerre universelle. Arras. Rue des Bouchers-de-Cité, n° 26, 28 et 30 (bombardement du 26 juin 1915). Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 1480.
Mais après cette terrible journée, les Arrageois ne sont pas au bout de leurs peines, d’autres destructions sont encore à venir. Le 5 juillet au soir, un nouveau désastre frappe la ville, après un bombardement visant spécialement la cathédrale et le palais Saint-Vaast.
Victor Leroy, propriétaire d’une droguerie dans la rue Saint-Aubert, écrit dans une lettre du 9 juillet : C’en est fini du musée, des archives, de l’évêché et de la cathédrale
, non sans tristesse et résignation. Il déplore aussi les nouveaux exodes de populations provoqués par les récents bombardements. En effet, selon lui, 155 personnes ont quitté Arras le 8 juillet 1915.
Après ces deux journées particulièrement désastreuses, les bombardements vont continuer sur la cité arrageoise, détruisant encore et toujours, et poussant de plus en plus de personnes à fuir la ville. En effet, le risque s’accroît au fil des jours, beaucoup de maisons étant désormais inhabitables. À la fin de l’année 1915, en septembre, les recensements montrent que seuls 1 200 habitants environ restent encore à Arras, contre plus de 3 600 en novembre 1914. Les destructions sont considérables, le patrimoine - le beffroi, les places, le palais Saint-Vaast – a été gravement touché, mais tous les Arrageois ont une conviction commune : Arras renaîtra de ses cendres.
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Victor Leroy et sa famille, carte-photo « tirée le 16 janvier 1916 pendant le bombardement », envoyée à Félicien Cornaille le 26 janvier suivant. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 4109
Victor Leroy et sa famille, carte-photo « tirée le 16 janvier 1916 pendant le bombardement », envoyée à Félicien Cornaille le 26 janvier suivant. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 4109
Bibliographie
Abbé E. FOULON, Arras sous les obus, Paris, Bloud et Gay, 1915. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHB 735 ;
Abbé MISERON, Quelques détails sur Arras, journal de guerre polycopié, 5-22 novembre 1914, 12 mars 1915-30 janvier 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, 1 J 131 ;
V. LEROY, Lettres adressées par la famille Victor Leroy d'Arras et de Paris à la famille Cornaille, 1 J 2008 ;
M. WARTELLE, Les Cités meurtries. Arras (1914-1915), Paris, librairie de l'Éclair, s.d. (Les champs de bataille 1914-1915), pp. 36-37. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHD 386.