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Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre

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Naissance à Arras de Charles de L’Écluse

Quel est le point commun entre la pomme de terre, la tulipe ou le marronnier des Indes ?
Ils ont tous trois été introduits en Europe par le même homme, Charles de l'Écluse, grand voyageur et botaniste du XVIe siècle.

Charles de L’Écluse, Carolus Clausius en latin, est né à Arras le 19 février 1526 ; son père, Michel, seigneur de Watènes, est membre du Conseil provincial d’Artois.
Grâce à son oncle maternel, grand-prieur de l’abbaye Saint-Vaast, Charles en fréquente l’école de 1540 à 1542.

Gravure noir et blanc d'un homme barbu portant une fraise autour du cou. Tout autour de son buste en médaillon se trouve un cadre orné de diverses guirlandes et bouquets de fleurs ; on remarque même deux écureils. Une légende en-dessous précise "Consilio Pylium, Chironem vincit in herbis, Atque Titum antiqua Clusius Historia".

"Carolus Clusius atrebas scriptor […]". Portrait gravé. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 J 474/19.

Son père le pousse à entreprendre des études de droit, d’abord à Gand puis à Louvain où il se rend en 1546. Il part à Marbourg en 1548 puis, attiré par le protestantisme, à Wittenberg en 1549, où il suit les cours de Philippe Melanchthon, humaniste et réformateur. Celui-ci l’incite à abandonner le droit pour la médecine et la botanique. C’est ainsi qu’en 1551, il s’installe à Montpellier et devient durant au moins trois ans le secrétaire du naturaliste Guillaume Rondelet. À ses côtés, il se découvre une véritable passion pour l’étude des plantes.

En 1554, ses études achevées, il s’établit à Anvers. Il traduit en français le Cruijdeboeck de Rembert Dodoens(Histoire des plantes, Anvers, Jean Loë, 1557) et en latin un ouvrage médical italien, Antidotarium, sa première collaboration avec l’imprimeur anversois Christophe Plantin (1561).

Ses voyages, à Paris (1561), dans le sud-ouest de la France, en Espagne et au Portugal (où il accompagne deux des fils du banquier Anton Fugger) en 1564-1565, mais aussi à Londres et Bristol (1571), lui permettent de rassembler de nombreux spécimens de plantes de la péninsule ibérique ou rapportés des Indes ou des Amériques : il publie chez Plantin des traductions latines des œuvres du Portugais Garcia da Orta (Aromatum et simplicium aliquot medicamentorum apud Indios nascentium historia, 1567) et de l’Espagnol Nicolas Monardes (De simplicibus medicamentis ex occidentali India delatis quorum in medicina usus est, 1574) ainsi qu’une première synthèse, Rariorum aliquot stirpium per Hispanias observatorum historia (1576).

De la botanique à la découverte de la pomme de terre

Grâce à l’appui de son ami, le médecin Johann Craton von Kraftheim, Charles de L’Écluse est, de 1573 à 1577, médecin de cour et directeur du jardin impérial de Vienne pour l’empereur Maximilien II (décédé en octobre 1576), son successeur, Rodolphe II, lui retirant en revanche ces charges.

Il entame alors une série de voyages en Autriche comme en Hongrie, où il est accueilli par Balthasar Batthyány au château de Güssing, et poursuit ses observations sur la végétation locale (Rariorum aliquot stirpium per Pannoniam, Austriam et vicinas quasdam privincias observatarum historia, Anvers, Plantin, 1583). Il correspond avec de nombreux savants et personnalités de son temps. Certains ambassadeurs lui offrent de même des plantes rares venues de contrées lointaines. Il peut ainsi réunir de nombreuses espèces remarquables et exotiques.

En 1588, il reçoit du gouverneur de Mons un tubercule encore mal connu en Europe, ramené du Pérou par des missionnaires et dont le pape Pie IV se servait, dit-on, pour soigner ses rhumatismes. Ce tubercule, à la chair ferme et blanche, allongé et rouge, de la taille d’une noix, et à qui Charles de L'Écluse donne le nom de papas des Péruviens, n’est autre que la pomme de terre. Frappé par la vigueur et la faculté prolifique de cette nouvelle plante, Charles de L’Écluse, qui connaît l’usage culinaire qu’en font les Indiens du Pérou, décide de la cultiver dans son jardin particulier, à Vienne puis à Francfort. Après avoir goûté avec délectation ces papas, il en distribue à ses amis en Allemagne, à Bruxelles et à Padoue.
Cette plante féconde devient très vite, à sa grande satisfaction, assez vulgaire dans la plupart des jardins de l’Allemagne .

La "tulipomania"

Dessin noir et blanc montrant une tulipe stylisée.

Détail de "Carolus Clusius atrebas scriptor […]". Portrait gravé. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 J 474/19.

Jusqu’alors, les plantes étaient avant tout étudiées et cultivées pour leurs vertus alimentaires ou médicinales. Charles de L’Écluse s’intéresse également aux plantes et à la nature "pour elle même".

Installé à Francfort-sur-le-Main à partir de 1588, il travaille pour le graveur et éditeur Théodore de Bry, et bénéficie d’une pension du landgrave de Hesse Guillaume IV (décédé en 1592). Il obtient finalement en 1593 la chaire de botanique à l’Université de Leyde et y crée, dès avant septembre 1594, l’un des plus importants jardins botaniques d’Europe.
Dans son hortus botanicus, il collectionne des plantes inhabituelles et exotiques qui sont pour certaines encore inconnues en Europe. Il décrit pour la première fois des espèces comme le jasmin ou les anémones. C’est lui qui introduit dans le nord de l’Europe le marronnier d’Inde et la tulipe, venue de Perse. Rapidement, cette dernière suscite curiosité et engouement, jusqu’à provoquer en Hollande, dès les années 1630, une véritable "tulipomania" : les bulbes tant convoités se vendent à prix d’or et, en France, elle devient la fleur officielle de la cour de Louis XIV.

Charles de L’Écluse achève ses grands traités de botanique et de mycologie, synthèses de ses ouvrages précédents, tels le Rariorum plantarum historia, comprenant ses recherches sur les champignons de Hongrie (Anvers, Jean Moretus, 1601) ou l’Exoticorum libri decem (Anvers, Raphelengius, 1605). Affaibli par les maladies et les accidents survenus lors de ses nombreux voyages, il meurt à Leyde le 4 avril 1609. Une édition posthume de ses recherches inédites paraît à Anvers en 1611, Curae posteriores.

Une variété de tulipe porte le nom de tulipa clusiana en son souvenir.

Bibliographie

  • E. ROZE, Charles de L’Escluse d’Arras. Le propagateur de la pomme de terre au XVIe siècle. Sa biographie et sa correspondance, Paris, 1899. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHA 19 
  • M.-E. BOUTROUE, "L’Écluse (ou L’Escluse), Charles de. Notice bio-bibliographique", in Médecins et naturalistes avant Linné, 2005 
  • The Exotic World of Carolus Clusius (1526-1609), Catalogue of an exhibition on the quatercentenary of Clusius’ death, 4 April 2009, Leiden University Library, 2009 (Kleine publicaties van de Leidse Universiteitsbibliotheek, nr. 80) 
  • F. EGMOND, The World of Carolus Clusius: Natural History in the Making, 1550–1610, Londres, 2010