Issu d’une souche normande par son père (caissier puis directeur d’une succursale de la Banque de France) et d’une famille de marins bretons par sa mère, Georges-Marie Besnier naît le 6 septembre 1879 à Saint-Servan, en Ille-et-Vilaine. Après de brillantes études au collège Saint-Charles de Saint-Brieuc puis au collège Stanislas à Paris, il obtient une licence ès lettres à l’âge de seize ans. Entré à l’École des chartes en novembre 1896, il côtoie le médiéviste Joseph Calmette (major de la promotion 1900) ou les Nordistes Félix de Coussemaker et Paul Denis du Péage ; il présente en thèse un Essai sur la perte de l’Inde. Le général Lally (1755-1761), marque précoce de son goût pour le XVIIIe siècle.
Un archiviste méthodique
Il débute sa carrière par un stage aux archives de la Somme puis un intérim aux archives de la Meuse (juin-octobre 1900), avant de rejoindre ses parents à Évreux et d’y occuper un poste intérimaire aux archives départementales de novembre 1900 à la fin de l’année 1901.
Au 1er janvier 1902, il prend la succession de l’archiviste de l’Eure, Georges Bourbon. Pour remédier au manque de place, il entame un tri massif et remanie les séries, surélève les travées et remet en ordre tout le dépôt. Il entreprend ensuite le récolement des fonds judiciaires, multiplie les inspections communales et enrichit la série L de nombreux fonds d’administrations cantonales.
Le 1er mai 1906, il obtient sa nomination comme archiviste du Calvados, en remplacement d’Armand Bénet, parti à la retraite. Il s’y efforce de regrouper les fonds, favorise les dons d’archives privées et multiplie les instruments de recherche, en particulier les répertoires numériques, qu’il est l’un des premiers à utiliser. Il fait appel au réseau des instituteurs pour enrichir les travaux du comité départemental pour l’histoire économique de la Révolution française, mais aussi le Répertoire des documents antérieurs à 1900 conservés dans les archives communales du Calvados.
Membre de la Société des Antiquaires de Normandie et de l’Académie de Caen, il prend une part prépondérante à la création du Bulletin des sociétés savantes de Caen (1909).
Sauver les archives du Pas-de-Calais
La Grande Guerre qui l’éloigne de Caen durant cinquante sept mois lui apporte encore les honneurs au sein du 3e régiment d’artillerie à pied, avec les galons de capitaine, trois citations à l’ordre de l’armée et la rosette de la légion d’honneur pour ses qualités militaires et son courage.
De retour à Caen en mars 1919, où il s’apprête à diriger l’agrandissement du dépôt, Georges Besnier accepte le 1er décembre de remplacer aux archives du Pas-de-Calais son condisciple Pierre Flament, mort au champ d’honneur devant Verdun le 3 août 1916, et de réorganiser les archives d’un département durement frappé par la guerre.
Il met à nouveau toute son énergie à résoudre les tâches qu’impose la reconstitution des archives départementales et communales sinistrées. À Arras, il conçoit dès 1923-1925 la construction d’un dépôt d’archives moderne. Il sauve l’essentiel des archives communales alors en grand péril et obtient qu’on aménage à Boulogne-sur-Mer et à Saint-Omer des salles susceptibles d’abriter de façon satisfaisante les fonds importants dont il a négocié le dépôt.
Responsable de la bibliothèque et des archives municipales d’Arras, Georges Besnier prend en outre de nombreuses responsabilités administratives, comme chargé de la liquidation de comptabilité de fait des communes (1919) puis chef du service départemental d’apurement des comptes de guerre et de ravitaillement (1924), comme chef de la 4e division de la préfecture (assistance et hygiène publiques, 1929), etc.
Conservateur des antiquités et objets d’art du Pas-de-Calais à partir de 1927, mais aussi de la Somme en 1935, il n’hésite pas à manifester son admiration pour l’œuvre de certains architectes chargés de la reconstruction, tel Louis Cordonnier pour le chantier de la Grand-Place de Béthune. Il anime l’Académie d’Arras aussi bien que la Commission départementale des monuments historiques, et est réputé apporter aux articles que publie cette dernière des corrections s’apparentant souvent à de véritables réécritures qu’il refuse systématiquement de cosigner.
Un dévouement sans faille
Au lendemain de la défaite de 1940, dans des conditions particulièrement difficiles, Georges Besnier accepte les fonctions de secrétaire général de la mairie d’Arras ; alors qu’il a atteint depuis avril 1940 l’âge de la retraite, il continue de même de diriger les archives du Pas-de-Calais jusqu’à la nomination de René Bargeton en février 1943, et est chargé en 1942 du contrôle de celles de la Somme.
L’aide qu’il ne cesse d’apporter à la Résistance justifie son arrestation par la Gestapo le 6 avril 1943 ; le 14 octobre, il est condamné par le tribunal de guerre d’Arras, pour détention d’armes, aide à évasion, établissement de fausses pièces d’identité. Il est détenu au quartier allemand de la maison d’arrêt Saint-Nicaise, puis à Loos, mais échappe in extremis à la déportation.
Après la Libération, il est nommé au comité local de libération d’Arras, et reprend pour plusieurs années encore ses fonctions de directeur des archives (octobre 1944-mai 1949) et de conservateur des antiquités et objets d’art du Pas-de-Calais.
Membre du Mouvement républicain populaire, il est élu au conseil municipal et devient adjoint au maire en 1947, mais démissionne peu après, sans doute par fidélité à son parti. Il est réélu en 1959, est favorable à l’alliance avec la SFIO, et est à nouveau adjoint au maire jusqu’à son décès accidentel, le 10 juin 1961.
Georges Besnier (1879-1961) ou l’intelligence et la vertu, de Nathalie Vidal, a été édité en son honneur par le Conseil général, pour l’inauguration en février 1999 de la nouvelle salle de lecture du centre qu’il avait fait construire et qui porte à présent son nom. Il présente ainsi le portrait d’un homme attachant et hors du commun, assez proche de sa légende.