Comment l’administration se souci de la renaissance d’Arras
Le 21 juillet, lors de la première réunion du conseil municipal à Arras, un de nos édiles demanda le retour à Arras du tribunal, réfugié à Doullens.
M. le Préfet, on s’en souvient, était présent à la séance ; il répondit avec chaleur que non seulement le tribunal, mais toutes les administrations rentreraient à Arras dès que la situation le permettrait.
Hé bien, non seulement nos administrations ne font rien pour ramener la vie à Arras, mais en fait elles font ce qu’elles peuvent pour entraver le relèvement.
Veut-on des exemples ? En voici de tout frais et particulièrement typiques :
On sait que sous les bombardements les plus violents, le tribunal siégea à Arras jusqu’à novembre 1916.
Alors partirent MM. Poteau et Godefroy, appelés à des postes plus élevés en récompense de leur très belle conduite ; en même temps le tribunal était envoyé à Doullens.
Cette mesure avait alors sa raison d’être, quelque tardive qu’elle fût, après vingt-cinq mois de bombardement ; elle ne l’a plus depuis le 9 avril dernier ; et pourtant le tribunal est-il revenu à Arras ? point du tout.
Et – pourquoi ne le dirais-je pas ? – non seulement il ne revient pas, mais il empêche de revenir des hommes qui, par leurs fonctions, seraient éminemment utiles au relèvement de la ville. À quoi bon préciser ? ces lignes seront comprises de ceux dont il faut qu’elles le soient et je n’ai pas l’autorisation nécessaire pour en dire davantage.
Mais voici un autre fait, non pas plus exact, mais plus précis :
Nous avons annoncé, il y a quelque temps, que M. Gobet, notre très sympathique juge de paix, avait repris à Arras le cours de ses audiences de simple police.
Tous les journaux de la région annoncèrent l’événement comme marquant une étape vers la reprise de la vie à Arras.
Ce qu’on ignore, ce que nous tenons à signaler, c’est ceci :
L’audience en question fut un acte d’initiative personnelle de M. Gobet. Ce dernier eut seul l’esprit de comprendre qu’il était absurde d’appeler à Aubigny les pauvres contrevenants d’Arras, chef-lieu de canton, pour leur infliger les francs d’amende qu’ils avaient encourus…
Mais dans l’administration il n’est pas permis d’avoir plus d’esprit que ses chefs ; M. Gobet l’avait oublié ; on le lui fit bien voir…
... Et voilà pourquoi, d’ici beau temps, nous n’aurons plus à Arras d’audience de simple police.
Bravo ! M. Gobet, nous penserons à vous quand viendra le moment de dresser le bilan des services que les hommes d’aujourd’hui ont rendu ou tâché de rendre à leur cité.
Gabriel AYMÉ