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Entretien de M. Augagneur avec Lord Churchill à Boulogne

Portrait noir et blanc d'un homme.

Winston Churchill.

Winston Churchill, lui qui, en parlant – dans d’autres circonstances, le 13 mai 1940 – de l’effort de guerre, dira je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur , est pourtant venu offrir son temps le 20 avril 1915 à Boulogne-sur-Mer, afin de rencontrer le ministre français de la Marine, Jean-Victor Augagneur.

Après une visite à Anvers en octobre 1914, c’est au tour de la France de recevoir le soutien et l’amitié du Premier Lord de l’Amirauté britannique. En plein enlisement du conflit des Dardanelles, ces deux commandants de pays alliés, notamment contre l’Empire ottoman, veulent assurer leurs peuples du futur succès de cette opération.

Cinq jours après la rencontre, le 25 avril 1915, un corps expéditionnaire franco-britannique débarque à l’entrée du détroit des Dardanelles ; mais cette attaque ayant tellement été retardée, les Turcs, prévenus, ont déjà pu fortifier une grande partie du détroit : elle aboutit ainsi à un fiasco.
Churchill et Augagneur payeront par la suite tous les deux le prix de cet échec aux Dardanelles, le premier en devant démissionner de l’Amirauté le 11 novembre 1915, le second en retournant le 29 octobre précédent sur les bancs de la Chambre des députés.

Chronique locale et régionale

Un entretien de M. Augagneur avec Lord Churchill à Boulogne

Sous ce titre, nous lisons dans le Matin :

Boulogne-sur-Mer, 22 avril. - Du correspondant particulier du Matin.

Lord Winston Churchill, ministre de la marine anglaise, est arrivé mardi à Boulogne, à bord d’un contre-torpilleur.

Il s’est rencontré, à la sous-préfecture, avec M. Augagneur, ministre de la Marine, où une réception leur avait été préparée. Un dîner les a réunis, dans la soirée, à l’hôtel de Folkestone.

M. Augagneur, qui est rentré hier à Paris, a déclaré que l’entrevue qu’il avait eue avec le premier lord de l’amirauté avait pour but de leur permettre de s’entretenir plus utilement et plus intimement de la situation des deux nations alliées, "situation, a affirmé le ministre de la marine, qui est en tous points favorable". M. Augagneur a ajouté que le public français aurait tort de croire que les opérations dont les Dardanelles sont le théâtre subissent un temps d’arrêt.

- La marine française, a dit le ministre, n’a jamais pensé que le forcement des détroits pût s’opérer sans une longue préparation. Mais elle a toujours cru et elle est persuadée plus que jamais que l’entreprise est chose possible. Avant longtemps, le résultat tant désiré par l’opinion publique aura été obtenu. Du reste les moyens les plus propres à hâter cet heureux évènement ont été l’un des objets principaux de mon entretien avec le premier lord de l’amirauté britannique.

(Nous aurions pu publier cette nouvelle mardi soir, mais nous ne l’avons point fait en raison d’instructions de la Censure qui nous a déclaré qu’il était interdit de parler des déplacements ministériels en vertu "d’ordres généraux" s’appliquant aussi bien à la Presse de Paris qu’à celle de Province).

La France du Nord, samedi 24 avril 1915. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 16/91.