Archives - Pas-de-Calais le Département
Les informations contenues dans cette page ne sont valables avec certitude que jusqu'à cette date et heure.

La poupée boulonnaise à la foire de Lyon

Photographie sépia montrant des poupées alignées devant une tenture.

Orphelinat des PTT, Arras, 23 mars 1924. Exposition de poupées. Archives de poupées. Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 1071.

Grande manifestation commerciale conçue dans le but de ravir sa clientèle à la foire de Leipzig, la seconde foire de Lyon accueille en pleine guerre et malgré la crise des transports plus de 2 700 vendeurs répartis sur près de 2 500 stands. La ville de Boulogne-sur-Mer y est représentée par cinq maisons de commerce, comme le précise un article paru dans La Croix du 25 mars 1917.

Une des sociétés présentes est l’ancienne faïencerie Jules Verlingue, créée le 13 avril 1914 à Boulogne-sur-Mer. Comme son nom l’indique, cette faïencerie, fondée en 1903, spécialisée dans les céramiques artistiques, s’est réorientée à la suite d’un incendie qui a détruit ses locaux en 1913. Désormais, ses 180 ouvriers fabriquent quotidiennement 5 000 têtes de poupées en porcelaine et 2 000 têtes de "mignonettes".

Cette industrie française de la poupée connaît un second souffle durant la guerre. Car, depuis la fin du 19ième siècle, l’arrivée massive de jouets allemands bon marché concurrençait sérieusement la production française.

Mais en 1914, lorsque les importations s’arrêtent du jour au lendemain avec l’entrée en guerre des deux pays, la France est dans l'obligation de se suffire à elle-même. C’est cette période qui va marquer la renaissance du jouet français.

Pour les œuvres de bienfaisance, la fabrication de poupées est également un bon moyen de faire travailler les femmes. De plus, la recette des ventes est reversée aux orphelinats.

Ainsi, la Ligue du Jouet français, créée par la baronne Laumont, réalise dans ses ateliers des poupées à la forme traditionnelle, avec un corps articulé, une tête mobile en biscuit et des habits régionaux ou historiques.

Tout comme la foire de Lyon, de nombreux salons organisés durant la guerre donnent de la visibilité à ces nouvelles créations. La poupée est mise à l’honneur lors de l’Exposition des jouets artistiques au Pavillon Marsan de Paris de mai à juin 1916, ce qui offre à 74 exposants la possibilité de montrer leurs réalisations. De novembre 1916 à janvier 1917, l’Exposition de jouets artistiques et de l’image de guerre populaire permet aussi à 87 exposants de présenter les dernières nouveautés.

La poupée boulonnaise à la foire de Lyon

La seconde foire de Lyon qui s’est ouverte dimanche dernier est un très grand succès.

Boulogne est représenté à la foire de Lyon par cinq maisons de commerce :

  • la société anonyme de l’Ancienne Faïencerie Verlingue,
  • la société des Produits céramiques et réfractaires,
  • les établissements Butel,
  • la maison Franchi,
  • et la maison Samuel.

L’exploitation de l’Ancienne Faïencerie Verlingue a fait une très grande sensation. Cette société a installé depuis un an dans de nouveaux ateliers à Bréquerecque, une usine de porcelaine dont les produits artistiques continuent les traditions de l’ancienne manufacture Haffreingue qui a produit de merveilleuses porcelaines d’art. On en admire encore de forts beaux exemplaires au Musée. L’usine Verlingue très encouragée par les pouvoirs publics et surtout par les syndicats féminins a entrepris courageusement la lutte contre l’industrie boche qui avait monopolisé la fabrication de la tête de poupée en porcelaine. Seule, elle est en état de lutter aujourd’hui contre la puissante société d’origine allemande qui continue, malgré la guerre, cette exploitation en France.   

La série de poupées « Liane » (un nom bien boulonnais) a recueilli à Lyon un succès extraordinaire. Le stand est désigné partout à la foire "Stand de la poupée d’art" et dimanche à l’inauguration, les acheteurs et le public se pressaient en une queue interminable à la porte du stand. Pour la 1re fois en France il est vendu des poupées avec des yeux dormeurs avec cils de qualité irréprochable qui étaient jusqu’ici un monopole jalousement exploité par les Allemands.

Les figurines artistiques inspirées des Sèvres du XVIIIe siècle et les très beaux échantillons de faïences, reproduction de Rouen et de Delft ancien ont aussi rencontré un accueil très flatteur près du public des acheteurs.

Nous souhaitons à ceux de nos concitoyens qui ont fait montre d’énergie et d’initiative en participant à cette foire malgré la distance et les conditions si pénibles de notre industrie dans la zone des armées de recueillir les fruits les plus plantureux de leur courageuse entreprise.

La Croix, dimanche 25 mars 1917. Archives départementales du Pas-de-Calais, PE 135/18.