La prise d’otages a été couramment pratiquée pendant la guerre 1914-1918. Ces prisonniers, choisis parmi les notables (élus, hauts fonctionnaires, industriels et ecclésiastiques), doivent répondre de la tranquillité de la population ou servent de moyen de pression, afin d’obliger l’ennemi à céder sur un objectif particulier. Les déportations, qui s’ajoutent à une occupation particulièrement rude dans le Nord de 1914 à 1918, sont aussi un moyen d’effrayer les populations et d’écarter les indésirables.
Le comte de Francqueville, maire de Bourlon, arrêté en octobre 1914 par l’autorité allemande, à la suite d’une dénonciation pour détention d’un poste de T.S.F., se trouve parmi les otages français rapatriés en ce mois de janvier 1916. Il avait été transféré le 18 mars 1915 à Wiesbaden, tandis que sa femme, son beau-frère l’abbé de Mun et d’autres membres de sa famille étaient renvoyés en France.
Né en 1852 dans une vieille famille noble du Cambrésis, Roger de Francqueville succède à son père, Ludovic de Francqueville, comme maire de Bourlon lorsque celui-ci décède en 1910 (il occupait ce poste depuis 1871). Après la guerre, son fils Bernard se fait également élire maire de Bourlon (de 1919 à 1935). Nommé officier de la Légion d’honneur le 30 octobre 1920, Roger de Francqueville décède à Paris le 4 juin 1933.
Dix Français, pris comme otages par les Allemands dans les régions envahies et envoyés par eux dans les camps d’internement en Allemagne, vont être ramenés en France par la Suisse, dit Le Temps.
Ils arriveront à Lyon mercredi matin, en gare des Brotteaux.
Ces dix otages échangés avec dix personnes allemandes retenues en France sont :
- MM. Desson, ingénieur, domicilié au château de Montrouge, près de Bertoncourt ;
- Noël, maire de Noyon, sénateur de l’Oise, directeur de l’Ecole centrale à Paris ;
- le comte de Francqueville, ex-officier d’état-major, maire de Bourlon (P.-de-C.) ;
- Trépont, Préfet du Nord ;
- Coquerelle, directeur du Mont-de-Piété de Saint-Quentin ;
- Catoire, maire de Saint-André, près de Lille ;
- Doloche, propriétaire à Jaudun (Ardennes) ;
- Lebas, maire de Roubaix ;
- Jacomet, procureur général à Douai ;
- le comte Albert de Forceville, capitaine de cavalerie en retraite, maire de Tavaux (Aisne).
Parmi les personnalités allemandes échangées, nous relevons les noms suivants : Georges Gessler, Auguste Kohler, Kaiser, von Bary, consul général d’Allemagne à Tunis, et sa femme.
Les époux von Bary ne comptent que pour une personne.C’est M. Ogier, directeur au ministère de l’intérieur, qui a été désigné pour aller saluer nos compatriotes à Schaffhouse.
Un déjeuner a été offert mardi, à Genève, aux rapatriés qu’un train spécial amènera à Lyon, où une réception leur sera offerte pendant l’arrêt du train. Ils arriveront à Paris à six heures quinze du soir.L’échange des otages a été négocié par les ambassades d’Espagne à Paris et à Berlin, avec l’assistance de M. Guérin, représentant le comité hispano-américain de ravitaillement.
Cet échange a été retardé par un incident imprévu.
Sur la liste des otages allemands était inscrit un bourgmestre qu’on ne retrouvait pas tout d’abord et qu’on finit par découvrir dans un camp de concentration de province.Voici quelques renseignements sur quelques-uns des otages français qui sont rentrés en France.
Nous avons déjà dit dans quelles conditions M. Trépont, préfet du Nord, fût arrêté à Lille, conduit dans une forteresse, puis dans un camp de prisonniers.
Le comte de Francqueville, qui se trouve parmi les otages français rapatriés, a épousé une sœur du comte Albert de Mun ; il est parent, par alliance, du comte de Francqueville, membre de l’Institut.
Dès la réception de l’heureuse nouvelle lui annonçant le retour de son mari, la comtesse de Francqueville est partie à Genève où elle a attendu l’achèvement des formalités de rapatriement.
Le comte de Francqueville fut emmené comme otage au mois d’octobre 1914.Maire de Bourlon (Pas-de-Calais), où il possède d’importantes propriétés, M. de Francqueville était resté à son poste au moment de l’invasion.
Il fût lâchement dénoncé par un cabaretier contre lequel il avait eu à sévir et qui l’accusa devant les autorités allemandes de posséder un poste de T.S.F.
Les Allemands perquisitionnèrent en vain pour découvrir cette installation.
Enfin, ils prirent le prétexte de ce qu’il connaissait parfaitement leur langue pour le retenir comme otage, tandis qu’ils envoyaient sa famille en Suisse.Ce vieillard de soixante-douze ans, de santé délicate, fût cloîtré dans une chambre avec dix autres prisonniers civils, n’ayant pour lit qu’une paillasse.
La geôle allemande n’était éclairée que par une imposte.
M. de Francqueville est le beau-père du comte d’Ursel, qui est resté à Bruxelles, chargé par le gouvernement belge de la garde des archives au ministère des affaires étrangères en Belgique.M. Jacomet, procureur général à Douai, fut arrêté par les Allemands dans la nuit du 5 au 6 mars 1915.
Pris par eux comme otage, il fut dirigé le 6 au matin sur le fort d’Hirson, dans l’Aisne, où il demeura jusqu’à son transfert à Rastadt, le 6 juin.
Le 6 décembre suivant, il était interné au château de Cell, dans le Hanovre, dans un camp d’officiers français prisonniers de guerre, où il retrouva un de ses parents, le général Ville, directeur du génie à Lille, et où il fit la connaissance d’un autre otage, l’héroïque bourgmestre de Bruxelles.
L’Indépendant du Pas-de-Calais, lundi 17 janvier 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 229/32.