La conférence franco-britannique qui a eu lieu à Calais le 6 juillet 1915 marque un tournant dans la conduite de la guerre.
Née du désaccord entre les deux nations sur les orientations données à la guerre sur le front occidental, elle a pour objectif d’aboutir à une coordination de leurs actions.
La visite commune de Lord Kitchener et d’Alexandre Millerand sur le front, et principalement à Saint-Omer où siège le Grand Quartier général britannique, en constitue une étape importante. Lors de cette réunion, les deux hommes abordent le délicat sujet de la répartition des pouvoirs de commandement lors d’attaques communes, ainsi que la question de la conscription en Angleterre, le volontariat devenant insuffisant.
En France - Lord Kitchener et M. Millerand parcourent ensemble le front
Lord Kitchener, répondant à l’invitation du gouvernement de la République, a passé les journées de lundi et de mardi au milieu de l’armée française. Il a inspecté mercredi l’armée britannique. M. Millerand l’accompagnait dans son voyage.
Débarqué en France, dans la nuit du 15 au 16, lord Kitchener arrivait dans nos lignes lundi matin par une petite ville du Nord où l’attendait le ministre de la guerre français accompagné du général commandant en chef. Lundi et mardi, le maréchal parcourut le front de l’armée française, de la gauche à la droite. Il put ainsi se rendre compte du plan d’ensemble de nos lignes de tranchées, de nos positions successives de défense et d’artillerie, et de l’organisation générale de nos moyens de guerre […]
M. Millerand sur le front britannique
Lord Kitchener et M. Millerand sont ensuite partis pour Saint-Omer où ils sont arrivés mercredi matin. Après une conversation entre les deux ministres, auxquels s’était joint le maréchal French, et dans laquelle furent réglées des questions intéressant les armées alliées, M. Millerand, accompagné de lord Kitchener, s’est rendu en automobile sur le front britannique. Il a successivement visité plusieurs organisations défensives composées de lignes de tranchées et de positions très fortes, ainsi qu’une escadrille d’avions dont les éléments ont évolué sous ses yeux.
Le ministre de la guerre français est ensuite revenu dans les cantonnements, passant en revue différentes unités de l’armée britannique. Il admira beaucoup la belle tenue des troupes et leur attitude martiale. Après un tour d’horizon sur les plaines du Nord, M. Millerand a visité les formations sanitaires et un dépôt d’éclopés remarquablement organisées et dirigés. […]
Une Revue à Saint-Omer
À Saint-Omer, une surprise l’attendait, sur un grand plateau ondulé qui domine la ville et dans la clarté d’une fin de journée radieuse, la garde britannique était massée. Près d’un vieux moulin flamand, les couleurs françaises et britanniques avaient été arborées.
M. Millerand passa devant le front des troupes tandis que la musique de la garde jouait la "Marseillaise". Puis il vint se placer entre lord Kitchener et le maréchal French, et aux accents des airs de leurs contrées respectives joués par les fifres et les cornemuses, les troupes anglaises, galloises, écossaises et irlandaises défilèrent devant le ministre de la guerre de France, tandis qu’au-dessus de lui évoluaient des avions.
M. Millerand fut frappé par l’impression de force que donnent les troupes britanniques ; il tint à dire à lord Kitchener et au maréchal French le fidèle souvenir qu’il devait emporter de cette émouvante revue.
À son retour, M. Millerand rendit visite à la mission française auprès de l’armée britannique et complimenta très vivement le général Huguet et ses dévoués collaborateurs pour leur participation à l’œuvre accomplie par l’armée alliée.
Le ministre de la guerre est rentré à Paris hier matin à 8 heures […]
La Croix du Pas-de-Calais, dimanche 22 août 1915. Archives départementales du Pas-de-Calais, PE 135/17.