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Anzin-Saint-Aubin, un cimetière de l’époque moderne, fouille, 2021
Une fouille archéologique a été menée en février 2021 par la Direction de l'archéologie du Département du Pas-de-Calais sur le site d'un futur lotissement à Anzin-Saint-Aubin. Sur une surface de 1500 m², les archéologues ont mis au jour des vestiges couvrant 4 grandes périodes chronologiques, de la fin du Moyen-Âge au début du 20ième siècle.
Le cimetière est constitué de 22 tombes individuelles disposées en un seul niveau. Aucune n’a été recoupée par une autre ou réduite pour occuper moins d’espace. Elles sont toutes orientées sud-ouest/nord-est. La tête des défunts se trouve au sud-ouest.
Un mystérieux cimetière du 15ième siècle
La découverte majeure est celle d'un cimetière daté par carbone 14 du 15ième siècle, en pleine Guerre de Cent Ans (1337-1453) opposant les royaumes de France et d'Angleterre. 22 sépultures y ont été fouillées, toutes orientées nord-ouest/sud-est. L'étude des squelettes montre qu'il s'agit uniquement de jeunes hommes âgés de 21 à 35 ans, dont certains présentent des blessures par arme à feu.
La numération 3D de la tombe contenant un individu et des balles de couleuvrine
Crédits : CD62 /DA /L. Wilket.
Plusieurs indices laissent penser qu'il s'agit d'un cimetière militaire de crise lié à un épisode de ce long conflit :
L'absence de recoupements entre les tombes indique un ensemble funéraire constitué rapidement
Certains défunts ont des liens familiaux et sont enterrés côte à côte
Les corps sont inhumés avec soin (linceul, cercueil) selon le rite chrétien, malgré l'urgence apparente
De la fouille au nettoyage des os
Galerie photos
Les défunts sont généralement placés sur le dos, mais celui-ci a été découvert dans une posture atypique. Ses jambes sont tournées vers la gauche, mais sa tête regarde à droite.
Certains défunts ont été déposés dans des cercueils en bois, comme en témoignent les clous mis au jour par les archéologues. D’autres défunts ont été enterrés dans des linceuls dont il subsiste quelques épingles.
Trois balles de mousquet ont été mises au jour lors de la fouille dans l’une des tombes. L’une des balles se situe au niveau de l’épaule.
Les deux autres balles de mousquet sont localisées, côte à côte, à la hauteur du genou du défunt. Ces balles, ont-elles blessé le soldat ou font-elles partie d’une offrande ? Les expertises des os permettront-elles d’affirmer la thèse de la blessure ?
L’archéo-anthropologue consigne la moindre information sur les 22 défunts avant le prélèvement des ossements.
Les os sont acheminés dans des sacs hermétiques à la Maison de l’Archéologie pour y être nettoyés afin de faire des investigations et de les conserver dans les meilleures conditions.
Une analyse au carbone 14 sur certaines dents des squelettes, permettra d’affiner la chronologie du site. L’étude scientifique suit son cours dans les laboratoires.
Les archéologues s'interrogent sur la nature exacte de ce cimetière, entre véritable cimetière de crise et cimetière militaire "de circonstance" plus organisé. Il pourrait être lié aux ultimes soubresauts de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons qui se termine en 1435.
Des traces d'occupation à l'époque moderne
La période moderne (16-18ième siècles) est représentée par plusieurs fosses et trous de poteaux. Leur agencement et le mobilier céramique retrouvé (vaisselle, pots) suggèrent une occupation militaire temporaire, peut-être liée aux sièges menés par les armées françaises contre les Espagnols qui tenaient la ville d'Arras en 1640 et 1654, pendant la guerre franco-espagnole. Anzin-Saint-Aubin se trouvait alors à proximité immédiate de la zone des combats.
Des vestiges de la Première Guerre mondiale
Enfin, deux fosses isolées datent de la Première Guerre mondiale (1914-1918). Elles n'ont pas été fouillées en détail mais leur présence n'est pas surprenante, la commune se trouvant sur la ligne de front à cette époque.
Des nouvelles données pour la connaissance de la région
Cette fouille préventive aura permis de documenter plusieurs épisodes méconnus de l'histoire de la région, en particulier un cimetière probablement militaire du 15ième siècle. Son étude approfondie viendra enrichir nos connaissances sur les pratiques funéraires en temps de guerre à la fin du Moyen-Âge. Plus largement, l'ensemble des découvertes illustre le rôle clé du secteur d'Arras, carrefour stratégique et militaire, du Moyen-Âge à l'époque contemporaine.