Archives - Pas-de-Calais le Département
Les informations contenues dans cette page ne sont valables avec certitude que jusqu'à cette date et heure.

Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre

En raison d’une panne du chauffage du Centre Georges-Besnier, sa salle de lecture (Arras) ferme jusqu’à nouvel ordre. Pour toute recherche administrative urgente sur les fonds conservés sur le site concerné (archives contemporaines), nous vous invitons à nous contacter pour une communication par correspondance ou, en cas de nécessité pratique, pour organiser une session de consultation en salle de lecture du Centre Mahaut-d’Artois des documents nécessaires à votre recherche.

Nous vous prions de nous excuser pour la gêne occasionnée et vous remercions par avance de votre compréhension.

L'argot du poilu

Pour exploiter certaines sources de l’histoire de la Grande Guerre et en faciliter la lecture, il est nécessaire de se familiariser avec le langage des poilus.
Qui n’a pas été un jour déconcerté par les expressions surprenantes des correspondances ou témoignages des combattants ?
Qui sait aujourd’hui encore que le terme "doryphore" était aussi courant que le mot "boche" pour qualifier le soldat allemand, qu’en évoquant les "séchoirs" les poilus parlaient des fils barbelés, que le "moulin à café" était en réalité une mitrailleuse, le "pot de fleurs" un casque et le "groin" leur masque à gaz ? Les expressions "battoirs" et "tartines" pour désigner les mains et les pieds, les "totos" pour les poux et le "perlot" pour le tabac sont tout aussi cocasses...

Comment est né ce langage du poilu ?

Carte postale couleur où l'on voit des cartouches (avec comme légende "dix ou vingt balles me feraient plaisir, mais pas de celles-là !", un baromètre "des tranchées" fixé sur beau-fixe (avec comme légende "comme santé, c'est ça !"), un baromètre enflammé dans un coeur ("le coeur est toujours chaud"), un bouchon ("pour les boches, un bouchon !"), une pensée ("et toutes mes pensées pour vous !".

Langage du poilu. Carte postale, s.d. Collection particulière. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 030/194.

Les soldats mobilisés dès le début du conflit, venant de diverses régions géographiques et de milieux sociaux différents, ont dû composer avec leurs cultures et leur nouvel environnement pour établir de nouvelles formes de communication et se rapprocher ainsi de leurs camarades d’infortune.
C’est à partir d’un amalgame de termes militaires déjà existants et de leurs parlers régionaux qu’ils vont concevoir un nouveau langage pour décrire et nommer ce qu’ils observent. C’est avec un vocabulaire extrêmement imagé et souvent comique que ces soldats vont brosser un portrait pittoresque de leur vie, du sacrifice et de l’enfer des combats, tout en banalisant ou en dédramatisant de la sorte la terreur de leur quotidien. Ils soulignent de même le mépris qu’ils éprouvent pour leur hiérarchie.

Les souffrances et les tourments qu’endurent les poilus sur la ligne de front vont encourager et consolider la culture d’un argot qu’ils utilisent pour discuter et chanter, voire parfois même pour se différencier des autres soldats ou des civils.
Leur jargon évolue de ce fait au fil des batailles et des réorganisations, mais surtout s'enrichit au contact des combattants étrangers. Il désigne tout sauf le drapeau français, emblème de la Patrie avec lequel il ne fallait pas argoter.

Des expressions imagées

De cette guerre naissent ainsi les "boyaux" des tranchées, "l'as de carreau" pour définir le sac à dos, la "Rosalie" pour nommer la baïonnette et le "crapouillot" pour le petit obusier.

L'adjudant est baptisé "le juteux", le capitaine le "capiston", le caporal "le cabot", le fantassin le "biffin" et le soldat d'infanterie coloniale le "marsouin". Ils s’approprient rapidement le "kaput" et le "tank" des Allemands, le "ok" et le "singe" des Américains, ou bien encore le "kaki" du corps indien. Grâce aux zouaves et tabors présents sur le sol français, l'arabe n'est pas en reste dans leur langage courant, avec l'arrivée des mots "toubib" pour le médecin, "bled" pour le village, "clebs" pour le chien, "barda" pour le paquetage…

Le constat est étonnant mais l’argot du poilu est toujours vivant un siècle après la Grande Guerre. De nombreuses locutions comme le "pinard" (vin) et le "cahua" (café) perdurent aujourd’hui encore dans le langage courant du nord de la France, tout comme les "esgourdes" (oreilles) et le "buffet" (poitrine), vulgarisées par la gouaille parisienne ou mafieuse chère à quelques romanciers ou dialoguistes comme Michel Audiard.

Cette brève présentation a pour but de permettre à chacun d’appréhender de façon sommaire l’argot du poilu, et d’encourager à explorer le sujet grâce aux nombreux ouvrages ou dictionnaires, parus dès le lendemain du conflit.

 

Carte postale couleur divisée en deux parties. À gauche, on voit un soldat entouré de deux femmes, tandis qu'à gauche, deux soldats chargent des obus dans un camion.

"Il y a bombe et bombe !" Collection particulière. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 057/028.

Pour aller plus loin