Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre
En raison d’une panne du chauffage du Centre Georges-Besnier, sa salle de lecture (Arras) ferme jusqu’à nouvel ordre. Pour toute recherche administrative urgente sur les fonds conservés sur le site concerné (archives contemporaines), nous vous invitons à nous contacter pour une communication par correspondance ou, en cas de nécessité pratique, pour organiser une session de consultation en salle de lecture du Centre Mahaut-d’Artois des documents nécessaires à votre recherche.
Nous vous prions de nous excuser pour la gêne occasionnée et vous remercions par avance de votre compréhension.
Une correspondance sous contrôle
Pendant la Première Guerre mondiale, chacun est avide de nouvelles, chacun veut rassurer, quitte à embellir la situation. Correspondre est devenu une règle, voire une nécessité pour les civils et pour tous les soldats qui écrivent quotidiennement à leurs parents et amis, mais aussi à leurs camarades de combat lorsqu’il leur est difficile ou parfois même impossible de se déplacer.
Même si le courrier reste le lien fort par excellence, les colis sont un complément tout aussi indispensable au moral des soldats, par la nourriture, le tabac, les vêtements qu’ils apportent, etc.
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La Guerre 1914-18. Arras (P.-de-C.) - Le bureau de provisoire des postes et télégraphes. Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 516.
La Guerre 1914-18. Arras (P.-de-C.) - Le bureau de provisoire des postes et télégraphes. Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 516.
L’armée, confrontée très tôt à de sérieux problèmes d’organisation face au volume des correspondances et des paquets qui transitent, mais aussi très consciente que leur bon acheminement est vital pour le moral des troupes, déploie rapidement des moyens à la hauteur de l’enjeu.
Trésor et Postes
Dès l’entrée en guerre, l’administration militaire unique appelée "Trésor et Postes" oblitère sans frais les courriers des soldats, mais aussi ceux qui leur sont adressés.
C’est au bureau central de la Poste militaire, installé au conservatoire national de musique de Paris, que l’on trie d’abord cette masse par secteurs postaux ; puis les courriers suivent sans que l’on puisse réellement identifier le secteur du front où se trouvait le régiment du destinataire : à chaque numéro correspond une division, un grand état-major ou un quartier général.
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Correspondance militaire. Ordre aux Armées. [Interdiction de mentionner la géographie et les noms de personnes]. Affiche. Archives départementales du Pas-de-Calais, 17 FIC 2759.
Correspondance militaire. Ordre aux Armées. [Interdiction de mentionner la géographie et les noms de personnes]. Affiche. Archives départementales du Pas-de-Calais, 17 FIC 2759.
Les sacs postaux sont ensuite dirigés sur les bureaux-frontières situés à la limite de la zone armée avant d’être transportés par des ambulants vers les vaguemestres d’étapes, chargés de les répartir entre les bureaux divisionnaires, où s’effectue alors le tri par régiment.
Les enveloppes sont alors remises aux vaguemestres des compagnies qui, quelle que soit la situation, les font parvenir aux soldats. Ils assurent aussi la triste mission de les renvoyer lorsque le soldat est mort, blessé ou fait prisonnier.
L’acheminement du courrier venant du front se fait par le chemin inverse, les bureaux divisionnaires le frappant de leur timbre et lui appliquant même parfois des mesures de retard systématique selon les instructions reçues.
Contrôle et censure
Toutes les lettres ou cartes sont soumises au contrôle d’un officier d’état-major régimentaire, puis à chaque étape de son acheminement.
Les courriers prélevés sont remis aux autorités supérieures pour un contrôle statistique, puisqu’aucune indication stratégique, de lieu, d’opérations ou de mouvements de troupe ne doit être mentionnée. Un rapport est par ailleurs établi chaque semaine sur le moral des troupes au vu de la teneur des lettres examinées. C’est sans compter sur les codes utilisés par certains soldats pour contourner le contrôle et communiquer avec leurs proches, d’autres écrivant dans un patois difficile à traduire par l’officier de relecture.
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Aubigny-en-Artois (?) pendant la première guerre mondiale ; soldats assis devant une tente. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 2933.
Aubigny-en-Artois (?) pendant la première guerre mondiale ; soldats assis devant une tente. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 2933.
Dans le climat régnant de suspicion, la censure des correspondances adressées à tout militaire en campagne est établie dès la mobilisation. Celle-ci s’applique de façon aussi stricte au courrier allant en direction du front qu’à celui qui en provient.
Le télégraphe, resté libre en début de guerre dans la zone des armées pour que l’état-major puisse utiliser les lignes civiles pour ses communications, fait lui aussi l’objet d’une étroite surveillance dès lors que les officiers s’en sont servi pour déjouer le contrôle postal et donner des indications plus précises à leur famille.
Mise en place de règles drastiques
Dès le 25 novembre 1914, sous prétexte de préserver le secret de la mise en place des offensives, les courriers, au départ comme à l’arrivée, seront bloqués au moins trois jours et ce délai pouvait aller jusqu’à huit jours selon les autorités.
Le 22 décembre 1914, le maréchal Joffre en personne redira aux militaires les règles imposées et les interdits de leur correspondance. Le 4 janvier 1915, le contrôle postal militaire sera officiellement établi sous la forme de visites surprises dans les bureaux de la Trésorerie et assorti de la menace d’interdire aux soldats de fermer leurs lettres.
Ces mesures, souvent méconnues de la plupart des soldats, n’atteignirent pas le but recherché puisque les familles étaient informées de la grogne qui grandissait au front d’une manière ou d’une autre.
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Carte postale collectée lors de l'opération Europeana. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 030/130.
Carte postale collectée lors de l'opération Europeana. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 030/130.
Un autre mécontentement se fera entendre rapidement dans le milieu des entreprises dont la correspondance commerciale était aussi entravée. En réalité, par ces mesures de contrôle, certaines étaient particulièrement gênées de voir révélées au grand jour certaines de leurs transactions.
Assouplissement de certaines mesures face à la pression
La pression était telle que le ministre du commerce et des postes demanda un assouplissement de cette règle de retard le 5 février 1915, une requête transmise par le ministre de la Guerre au maréchal Joffre.
Un projet à soumettre au gouvernement arrivera le 2 mars au cabinet du Ministre : il organise dans les moindres détails les conditions de leur fonctionnement, la légalisation de la saisie du courrier, etc.
Le 15 avril 1915, pour éviter la diffusion éventuelle de nouvelles susceptibles de ralentir le recrutement des tirailleurs nord-africains, il sera décidé qu’ils ne communiqueront avec leurs proches que par l’intermédiaire de leurs officiers et au moyen de cartes postales proposant un certain nombre de formules toutes prêtes.
Loi sur la surveillance constante et générale du courrier
Le 9 juillet 1915 paraît enfin un document de travail qui déboucha sur un texte définitif instaurant une surveillance constante et générale sur le courrier. Promulgué le 27 juillet 1915, il reste en vigueur durant toute la guerre et ne sera suspendu qu’en date du 21 novembre 1918.
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Territoriaux de France. Affiche de propagande. Archives départemenales du Pas-de-Calais, 17 FIC 2756.
Territoriaux de France. Affiche de propagande. Archives départemenales du Pas-de-Calais, 17 FIC 2756.
Les lettres des militaires doivent désormais être déposées ouvertes dans les boîtes des vaguemestres et non plus dans les bureaux de poste civils ; le colportage du courrier est interdit.
Les commissions de censure doivent au moyen d’une grille d’analyse rendre compte de leurs investigations et proposer des sanctions selon un barème précis. L’opinion et les impressions des civils et des militaires doivent ainsi remonter jusqu’au ministre. Cette étude n’est en fait exploitée que par le haut-commandement pour organiser la répression.
En règle général, les carnets de route et carnets de guerre écrits au quotidien et sans souci de masquer la réalité cernent mieux la réalité de la guerre que les correspondances. Le contraste entre le front et l’arrière était tel que deux mondes se côtoyaient sans vraiment se comprendre. La correspondance n’est donc pas un témoignage fiable en temps de guerre même si elle demeure un document d’archives essentiel qu’il convient d’étudier avec rigueur et précaution. Au-delà des artifices ou des non-dits, elle offre un rare éclairage sur les mentalités de l’époque.
Bibliographie
G. BACONNIER, A. MINET, L. SOLER, "Quarante millions de témoins", dans Gérard Canini dir., Mémoire de la Grande Guerre : témoins et témoignages,actes du colloque de Verdun (12, 13, 14 juin 1986), Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1989
M.-C. FLAGEAT, Courriers ordinaires en temps de guerre, un patrimoine aux multiples facettes, mémoire de DEA sciences de l’information et de la communication, ENSSIB, Université de Lyon, 1993.
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