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Mgr Henri Dutoit est sacré évêque d’Arras

Jeunesse

Fils d’Henri Dutoit, directeur de blanchisserie, et de Jenny Coustenoble, mère au foyer, Henri-Édouard Dutoit naît le 4 juillet 1873 à Armentières. Élève à l’institution Saint-Jude d’Armentières, il y obtient son baccalauréat en 1890 ; trois ans plus tard, il est licencié ès-lettres au séminaire académique de Lille. Affecté à Saint-Jude comme séminariste-professeur en attendant d’effectuer son service militaire, il est appelé en novembre 1894 au 43ième RI de Lille. Libéré en octobre 1895, il retourne au séminaire académique de Lille, pour ses études de théologie ; il y fait la connaissance des professeurs Hector Quillet (natif de Bois-Bernard dans le Pas-de-Calais) et Jean-Arthur Chollet (né à Avocourt, Meuse), deux futurs évêques qui seront pour lui d’ardents soutiens quelques années plus tard.

Une carrière tournée vers les ordres

Ordonné prêtre à Lille le 27 mai 1899, Henri-Édouard Dutoit occupe le poste de professeur de philosophie à l’institution Saint-Jean de Douai de 1899 à 1905, puis est nommé supérieur de l’institution Notre-Dame-des-Victoires à Roubaix à la rentrée 1905, peu avant le déclenchement de la séparation des Églises et de l’État. En 1910, il devient vice-recteur de l’université catholique de Lille. Il a la charge d’y imposer le serment antimoderniste, voulu par le pape Pie X. Il est ensuite promu chanoine honoraire (1912).

Carte postale noir et blanc montrant un homme vêtu de l'habite épiscopal assis de trois quart.

S[on] excellence Mgr Henri Dutoit, évêque d'Arras, Boulogne et Saint-Omer [1930-1933]. Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 1049.

Mobilisé le 3 août 1914 à la 1re section territoriale des infirmiers militaires, Henri-Édouard Dutoit est affecté au camp retranché de Maubeuge : il tombe avec toute la garnison aux mains de l’ennemi le 7 septembre 1914. Interné dans un camp d’officiers au château de Celles (Basse-Saxe), il est libéré en juillet 1915, et passe à la 42ième section des hôpitaux de Limoges. Dès le mois d’août, il s’attache à publier le Bulletin de guerre des facultés catholiques de Lille, servant de liaison entre les professeurs et leurs étudiants dispersés par le conflit. Nommé caporal en avril 1917 puis mis en sursis d’appel au profit de la Catho en octobre, il rejoint Paris pour ouvrir, au 104 de la rue Vaugirard, le siège provisoire des facultés catholiques de Lille, doté d’un bureau de renseignements et de secours.

En mars 1918, il se rend à Rome : il y rencontre en audience privée le pape Benoît XV et ne revient à Lille qu’en octobre, après la libération. Démobilisé le 12 mars 1919, il retrouve son poste de vice-recteur, avant d’obtenir celui de secrétaire général de la faculté de 1920 à 1925. Lorsqu’Achille Liénart devient évêque de Lille le 8 décembre 1928, il appelle à ses côtés Henri-Édouard Dutoit comme vicaire général et archidiacre de Lille-Roubaix-Tourcoing, poste où ce dernier va être le témoin privilégié d’un engagement au profit de l’Action catholique et sociale.

Nomination à l’évêché d’Arras

Peu après le décès de Mgr Julien, évêque d’Arras le 14 mars 1930, Henri-Édouard Dutoit est choisi par Pie XI pour lui succéder, le 22 décembre ; il reçoit ses bulles de nomination le 22 janvier 1931 et prend possession du siège par procuration le 31. Il est sacré à Lille dans l’église Saint-Maurice le 11 février par le cardinal Liénart puis intronisé à Arras le dimanche 22 février 1931. Un long cortège traverse la ville, de la place de la Gare à l’église de Saint-Nicolas-en-Cité, qui remplace pour l’occasion la cathédrale dont la reconstruction est toujours en cours. Au siège épiscopal d’Arras, Mgr Dutoit conserve autour de lui les chanoines Édouard Maréchal (comme chancelier), Victor Pollard et Paul Hoguet.

Les sombres heures de la Seconde Guerre mondiale

Lorsque la guerre éclate en 1939, le diocèse comme le pays sont bouleversés, et l’élan donné à l’évêché est brutalement stoppé. Obsédé par son désir de rebâtir un monde chrétien, Mgr Dutoit se laisse fasciner par le maréchal Pétain dès le début de l’Occupation et par la politique de restauration des valeurs traditionnelles engagées par Vichy.

Devenu aux yeux d’une partie de l’opinion "l’évêque de la collaboration", il n’échappe ni à l’arrestation ni au procès public à la Libération. Une des premières mesures prises par le préfet Cabouat le 1er septembre 1944 est d’ailleurs de l’obliger à quitter Arras. Il est placé en résidence forcée dans une propriété de l’évêché à Gommecourt, puis déplacé à Lille au couvent des Filles-de-Jésus, où il attend qu’on statue sur son sort. S’il évite la Cour de justice, tout retour dans le diocèse lui est interdit.

Pie XII lui demande de démissionner, ce qu’il accepte le 11 septembre 1945. Il est alors nommé à titre honoraire évêque de Létopolis, puis promu archevêque honoraire de Sébastopolis le 23 avril 1949. Il décède à Lille le 17 avril 1953 ; ses obsèques sont célébrées à Arras le 22 avril suivant et il est inhumé dans la crypte des évêques de la cathédrale.

Bibliographie

  • M. BEIRNAERT, "Henri Dutoit, évêque d’Arras pour le meilleur et pour le pire ?", Gauhéria, n° 86, pp. 51-73, Souchez, 2013. Archives départementales du Pas-de-Calais, PC 1598/16
  • M. BEIRNAERT, "Document. Quand Aimé Guerrin, fondateur du Lion d'Arras, mettait en garde Mgr Dutoit en 1942 et 1944 contre son soutien au régime de Vichy", Histoire et archéologie du pas-de-Calaist. XXXIVpp. 125-133, Arras, 2017.  Archives départementales du Pas-de-Calais, PC 1602/41
  • C. HUBERT, "L'évêque, le Maréchal, la collaboration, 1940-1945", Revue d'histoire de la deuxième guerre mondiale et des conflits contemporains, n° 135, pp. 47-86, 1984. Archives départementales du Pas-de-Calais, PB 31/24