Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre
En raison d’une panne du chauffage du Centre Georges-Besnier, sa salle de lecture (Arras) ferme jusqu’à nouvel ordre. Pour toute recherche administrative urgente sur les fonds conservés sur le site concerné (archives contemporaines), nous vous invitons à nous contacter pour une communication par correspondance ou, en cas de nécessité pratique, pour organiser une session de consultation en salle de lecture du Centre Mahaut-d’Artois des documents nécessaires à votre recherche.
Nous vous prions de nous excuser pour la gêne occasionnée et vous remercions par avance de votre compréhension.
Émile Basly, qui avait été inquiété par les Allemands au sujet de l’absence suspecte de son fils en octobre 1914 et qui eut à soutenir une lutte constante contre les prétentions du commandement allemand, s’est néanmoins acquitté admirablement de ses missions de maire et de député avant d’être évacué vers Namur le 14 avril 1917 au moment de l’offensive anglaise. Arrivé avec un convoi de rapatriés originaires de Lens et d’Avion à Évian le 7 août, il accepte de s’entretenir avec la presse au sujet des souffrances subies par la population, les obstacles rencontrés lors de leur périple et ses privations jusqu’au jour du rapatriement sur le territoire Suisse.
M. Basly est arrivé à Paris
Il raconte les souffrances des habitants de Lens
Paris 9 août,
M. Basly, député-maire de Lens qui est arrivé mardi matin à Évian avec Mme Basly, fait partie, on le sait du convoi de rapatriés venant de Lens et l’ancien mineur n’a quitté sa ville qu’à la dernière extrémité par la force le 12 avril dernier, quand se déclara l’offensive anglaise que le séjour dans la ville déserte par plus de 8 000 de ses habitants n’était plus supportable puisque le bombardement anglais augmentait chaque jour d’intensité.
Après avoir passé la journée d’hier avec ses compatriotes rapatriés aussi en France, le député de Lens a voulu prendre avec eux le train des rapatriés. C’est avec eux qu’il est arrivé à Paris ce matin à 9 heures de demie. Son fils et ses parents l’attendaient sur le quai de la gare. Parmi les personnes venues pour saluer leur ami, nous reconnaissons plusieurs socialistes : MM. Camelinat, Dubreuin, Evrard, Jouhaux.
Après s’être livré de bonne grâce aux photographes et cinématographes, M. Basly a bien voulu nous confier quelques-unes de ses impressions :
"On nous a évacués le 12 avril, nous donnant quelques heures seulement pour nous préparer, la caisse communale restant entre les mains des Boches, j’ai protesté avec indignation. Ils me l’ont fait porter au train, mais sur les 500.000 francs que j’avais réservé, il manquait près de 100.000 francs.
On nous a fait faire, pour nous évacuer sur la Belgique un trajet de 18 kilomètres à pied, de Lens à Dourges. À Dourges il tombait de la neige et il faisait un froid intense. Nous marchions comme un véritable troupeau, toujours la menace à la bouche, les Boches nous amenèrent à la gare de Dourges, où à huit heures du soir on nous empila dans des wagons à bestiaux, sales et dégoutants. Le voyage dura 22 heures. On nous transporta à Havelance, de là à Maffres, province de Namur. On nous a laissés à peu près tranquilles. À Lens nous étions bien ravitaillés par le secours américain d’abord, et par suite des précautions que j’avais prises. J’avais en effet emmagasiné de la farine, du riz, des céréales de toute nature que j’avais placées dans un magasin spécialement affecté à l’Hôtel-de-Ville.
Naturellement les Boches ont tout pris dès le premier jour. Ils ont voulu affirmer leur autorité avec l’arrogance qui leur est habituelle. J’ai toujours résisté le mieux que j’ai pu. Ils ont tout de même fusillé sans raison, dix des nôtres.
À Lens ils ont tout fait sauter avec des mines et les caves, ces caves où nous avons passé deux ans, deux ans de souffrances, et d’espérance aussi. Ce qu’il faut dire c’est que le moral chez nous est excellent. On a confiance. Là-bas, on supporte le joug avec l’espoir d’une prochaine délivrance".
Havas
Le Télégramme, vendredi 10 août 1917. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 9/28.
Concernant la reconstitution des mines du Pas-de-Calais et notamment celles de Lens inondées ou détruites à coups de canons, Émile Basly estimera que seul Élie Reumeaux, directeur des mines de Lens, sera capable de se mesurer avec la réalité et de surmonter les obstacles. Si la résurrection du bassin houiller sera une tâche difficile et complexe pour Elie Reumeaux et ses ingénieurs, Émile Basly a la profonde conviction qu’ils sauront relever la vie dans ces régions dévastées et qu’ils pourront extraire du charbon dans un délai de trois ans puisqu’on trouve, sur Lens, des couches de charbon à deux cent mètres de profondeur.
De nouvelles galeries pourront être creusées cinquante mètres plus bas puis continuer par les puits qui ne dépassent pas cinq cent à six cent mètres de profondeur. Il faudra en conséquence s’atteler à reconstruire les six mille maisons ébranlées par les obus allemands et remédier surtout au problème de la main d’œuvre, qu’il s’agisse des mineurs éparpillés dans les différents centres houillers de France et d’Allemagne, et de maçons en nombre pour réédifier ou consolider les habitations.
M. Basly, député de Lens et la "résurrection" des mines du Pas-de-Calais
M. Émile Basly, député et maire de Lens, a bien voulu nous entretenir de la reconstitution des mines du Pas-de-Calais et notamment de celles de Lens, inondées et systématiquement détruites à coup de canon par les artilleurs boches.
̶ Laissez-moi vous dire tout de suite nous a-t-il déclaré, que nous sommes tous unanimes à reconnaître dans le Pas-de-Calais, que le seul architecte capable de se mesurer avec les réalités et de surmonter obstacles et difficultés, c’est M. Élie Remeaux, directeur, des mines de Lens. Malgré ses soixante-dix-huit ans sonnés, il sera encore l’indispensable artisan de l’œuvre de reconstitution et de "résurrection" de notre bassin houiller. Mais grande, difficile et complexe sera sa tâche, ainsi que celle des éminents ingénieurs qui sont ses collaborateurs, depuis de nombreuses années. Ceux-là, ̶ j’en ai la plus profonde conviction. ̶ sauront substituer la vie à la mort dans nos régions désolées, dévastées, ravagées, incendiées.
Je crois ainsi, que l’on pourra extraire du charbon dans un délai de trois ans, car, à Lens, on trouve des couches de charbon à 200 mètres de profondeur. C’est dire par conséquent, qu’à 50 mètres plus bas, on pourra creuser de nouvelles galeries. Puis on continuera par les puits qui ne dépassent pas 500 ou 600 mètres de profondeur.
Il faudra en outre s’occuper simultanément de la reconstitution des six mille maison détruites ou ébranlées par les obus.
Et puis, que sont devenues les dix mille mineurs occupés tant à la surface qu’au fond ? Tous disséminés, éparpillés dans les différents centres houillers de France et hélas ! d’Allemagne. C’est donc le problème de la main-d’œuvre qui se pose. ̶ au double problème en réalité, si l’on songe au nombre de maçons qu’il faudra recruter pour réédifier ou consolider.
La France du Nord, jeudi 16 et vendredi 17 août 1917. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 16/96.