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Le cimetière militaire portugais de Richebourg

Affecté depuis novembre 1917 à la défense d’un front de 11 kilomètres entre Laventie et Festubert, enclavé entre la plaine de la Lys et le canal de La Bassée, le Corps expéditionnaire portugais (CEP) subit de plein fouet l'attaque allemande lancée le 9 avril 1918 lors de la bataille de la Lys.

Un contexte difficile

Vue de l'intérieur du cimetière portugais de Richebourg, où flotte au centre le drapeau portugais.

© Ivan Pacheka. Cimetière portugais de Richebourg.

En décembre, le gouvernement portugais est renversé par le coup d’État de Sidónio Pais. Au pouvoir durant un an (il est assassiné le 14 décembre 1918), ce dernier remet ouvertement en cause l’engagement du Portugal auprès de ses alliés, ce qui a pour conséquence l’arrêt de l’envoi de nouveaux contingents. De leur côté, les Britanniques préfèrent affecter leurs transports aux troupes américaines, fraîchement engagées dans le conflit.

Se sentant abandonné, peu expérimenté, souffrant de conditions climatiques particulièrement rudes, le CEP voit le moral de ses troupes dangereusement décliner au cours de l'hiver 1917. Des mouvements de contestation se multiplient dans ses rangs. C’est dans ce contexte difficile que les Allemands lancent une attaque d’envergure le 9 avril à 8 h 45.

La bataille de la Lys

Alors en pleine relève, les deux divisions du CEP partiellement désorganisées sont attaquées par dix divisions allemandes en trois lignes du front. Le choc est violent, 100 000 hommes s’élancent contre une ligne de défense composée de 20 000 hommes. Les troupes portugaises sont balayées par l’invasion massive. Le CEP perd 6 684 hommes et 299 officiers. Plus de 7 000 prisonniers sont emmenés par les Allemands.

Au lendemain de cet échec, aux côtés des Écossais, les survivants s’accrochent à La Couture, avant de devoir se replier vers Ambleteuse. Là, les Britanniques aménagent une base portugaise regroupant des réserves de soldats et un hôpital militaire. Dans ce lieu, 42 autres hommes y perdent la vie et sont inhumés dans le cimetière militaire de Boulogne.

Durant la seconde quinzaine d’avril, des soldats portugais sont envoyés soutenir les divisions britanniques stationnées entre Lillers et Steenbecque, et participent aux offensives de l’été 1918.

Le cimetière militaire portugais de Richebourg

Situé à quelques mètres du mémorial indien de Neuve-Chapelle, sur la route de La Bassée à Estaires, au lieu-dit les Capiétans, le cimetière portugais de Richebourg est le seul consacré aux Portugais sur le front ouest.

Monument aux morts en pierre blanche, fleuri.

Il est inauguré par le maréchal Joffre en 1923, mais le terrain n’est acquis que l’année suivante par le Portugal. La Commission portugaise des sépultures de guerre se charge dès lors de la recherche et du regroupement des corps, venant de France, de Tournai en Belgique comme d’Allemagne, en collaboration avec l’administration française (Ministère des Anciens Combattants et 1re région militaire) ; il accueille 1 480 tombes en 1935.

Le site est agrandi en 1939, permettant de regrouper d’autres corps (41 de Brest, 6 de Chartres, près de 400 de la Côte d’Opale), pour un total de 1 831 tombes.

En février 1935, le consul du Portugal à Arras, Lantoine, prend l’initiative d’aménager un mur de briques, puis d’élever en 1937 l’imposant portail en fer et bronze conçu par le dessinateur Tomás Leal da Câmara (1876-1948). Les matériaux utilisés ont été ramenés du Portugal et débarqués au Havre : 104 000 kilos de pierre travaillée et 137 000 kilos de stèles. L'aménagement des lieux a été réalisé par des ouvriers portugais.

Groupe de militaires et de personnalités parmi lesquels figurent N.N. Christiaens, Guy Mollet, le général Ferreira, Martins et Lantoine, consul du Portugal.

Manifestation commémorative pour le 35e anniversaire de la bataille de la Lys ; La Couture, 17 mai 1953. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 3414.

Une cérémonie a lieu avant même la fin des travaux, le 29 avril 1935, en présence de l’inspecteur des sépultures militaires portugaises Inacio Pimentel et de l’architecte Tertuliano Marques (1883-1942), de Lantoine, de Pereira Scherley (vice-consul à Boulogne-sur-Mer), d'Ernesto Costa (entrepreneur), de Victor Cassez (maire de La Couture) et de Fortuné Boulinguez (maire de Richebourg).

Chaque année, le premier ou le deuxième samedi du mois d’avril, une cérémonie est organisée sur le site avec la présence de nombreux Portugais, parmi lesquels figurent des descendants des combattants inhumés. Les commémorations ont lieu au cimetière portugais puis à la chapelle Notre-Dame de Fatima (située en face) et au monument aux morts de La Couture. Le 9 avril 2018, le mémorial reçoit la visite des deux présidents français et portugais en exercice, Emmanuel Macron et Marcelo Rebelo.

Le 1er mai 2004, le Président de la République portugaise Jorge Sampaio est également venu s’y recueillir et a laissé une plaque, aujourd’hui fixée au pied du drapeau national. Sur le mur du fond, sont apposées d’autres plaques, commémorant les visites de dignitaires et hauts responsables.

Pour aller plus loin

  • B. GHIENNE, "Le corps expéditionnaire portugais dans la Grande Guerre", Gauheria, n° 72, 2010, pp. 15-32. Archives départementales du Pas-de-Calais, PC 1598/14 ;
  • M. DO NASCIMENTO, Les soldats portugais des tranchées de Flandres et la main-d’œuvre portugaise à la demande de l’État français, Paris, L’Harmattan, 2014, 244 p. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHB 7542 ;
  • N. SEVERIANO TEIXERA, L’entrée du Portugal dans la Grande Guerre, Paris, éd. Economica, 1998, 390 p. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHB 5821.

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