M. le Préfet du Pas-de-Calais visite les communes libérées
Bien que retenu par les conseils de révision, M. Robert Leullier, préfet du Pas-de-Calais, poursuit activement la visite des localités reconquises du département.
La semaine dernière, il avait tenu à se rendre dans la partie située au nord de Béthune. De cette ville, où les alentours de la Grand'Place et du vieux beffroi ne sont plus que débris, il s'est rendu dans les communes toutes proches de la ligne de feu : à Hinges, Locon, Montbernancourt, Calonne-sur-la-Lys, Saint-Floris, Robecq, Lestrem et Saint-Venant. Partout il a constaté de nombreux sinistres.
Dans cette dernière localité, il s'est arrêté longuement à l'asile-hospice départemental où les dégâts sont importants, mais heureusement réparables.
Avant-hier lundi, il était à Arras, témoin de la recrudescence de rage impuissante, mais dévastatrice, du boche maudit. Depuis quelque temps, en effet, l'héroïque chef-lieu est redevenu le point de mire des obus allemands et de nouveaux dommages y sont constatés.
D'Arras, M. le Préfet est allé à Beaurains, Neuville-Vitasse, Mercatel, Boiry, Ervillers, Croisilles, Mory, Écoust-Saint-Mein.
Toutes ces communes sont complètement détruites ; c'est partout la pénible impression d'une dévastation sinistre et horrible. Mais, si, dans quelques-unes d'entre elles, on aperçoit encore de faibles vestiges de vie, quelques rares pans de murs branlants et quelques caves qui abritaient des nids de mitrailleuses, la vision d'anéantissement est encore plus grande à Croisilles que partout ailleurs. Ce chef-lieu de canton est peut-être de toutes les localités voisines, la plus éprouvée, celle où l'ennemi s'est complu à ne laisser qu'un désert bouleversé, qu'un spectacle inouï d'indicible désolation et de mort.
À Bapaume, M. le Préfet a revu les mêmes horreurs et cette cave béante de l'hôtel de ville où les députés Albert Tailliandier et Raoul Briquet eurent une fin si tragique.
Sa tournée s'est terminée par la visite des communes d'Haplincourt, de Bertincourt, de Ruyaulcourt. Mais arrivé au bois d'Havrincourt que nos vaillants alliés disputent à l'ennemi, il fut contraint de s'arrêter, ne pouvant pousser plus avant.
Ce fut d'ailleurs une journée bien remplie, que ce pèlerinage non sans péril, aux terres hier encore si prospères et si fécondes de l'Artois, aujourd'hui pleines de mitraille, de sang et de ruines, mais où germe déjà le levain de la VICTOIRE et des justes RÉPARATIONS.