Pendant les quatre jours qui précèdent l’offensive, les Britanniques écrasent les forces allemandes sous un déluge d’obus de tout calibre. Les bombardiers du Royal Flying Corps effectuent des attaques sur les arrières ennemis, leurs dépôts de munitions et les gares. Dans la nuit du 8 au 9 avril, pendant cinq heures, des gaz toxiques prennent le relais.
Tout est fait pour désorganiser et réduire au minimum la capacité de résistance des Allemands, qui baptisent ces jours sombres la "semaine de souffrance".
L’assaut venu des souterrains
Le 9 avril, lundi de Pâques, à 5 h 30, dans des conditions météorologiques éprouvantes (froid, pluie, neige), l’attaque commence en deux endroits : Vimy et Arras.
À Arras, 24 000 soldats britanniques (soit l’équivalent de la population de la ville à la veille du conflit) jaillissent des vingt sorties de tunnels et partent à l’assaut des premières lignes allemandes, après avoir passé huit jours dans les galeries et les carrières.
Ce secteur est l’une des rares zones de faiblesse du front allemand. En effet, à la suite du retrait sur la ligne Hindenburg, les effectifs en première ligne y sont limités ; les divisions de contre-attaque, en arrière du front, sont cantonnées dans des abris fortifiés de grande profondeur, mais à une distance de 25 kilomètres. De ce fait, 26 divisions britanniques d’infanterie et 3 de cavalerie font face à seulement 7 divisions allemandes.
Dans les tranchées ennemies, où il n’y a que des guetteurs, c’est la surprise. Les hommes n’ont pas le temps de prévenir leurs troupes.
La progression rapide des troupes britanniques
En une demi-heure, les Britanniques s’emparent de la première ligne allemande, à l’est d’Arras. La deuxième ligne tombe au bout de six heures. Le front est alors enfoncé sur une profondeur de 5 kilomètres avec des pertes minimes pour l’assaillant. Celui-ci s’attaque alors à la troisième ligne (Brown Line, ligne Wancourt-Feuchy), où se trouvent de puissants blockhaus, et l’atteint après douze heures de combat.
À la fin de la matinée, plusieurs villages autour d’Arras sont sous contrôle ; au bout de deux jours, Thélus, Farbus, Saint-Laurent-Blangy, Feuchy, Athies, Fampoux, Tilloy-les-Mofflaines et Neuville-Vitasse sont tombés aux mains des Britanniques.
Pour aider les soldats dans leur progression, 48 chars d’assaut de la 1re brigade du Machine Gun Corps sont répartis entre les différents corps alliés : 8 au corps canadien, 8 autres au XVIIe corps et 16 à chacun des VIe et VIIe corps. Le haut commandement britannique compte beaucoup sur ces chars. Mais la plupart d’entre eux se révèlent inutiles dès le début des opérations (embourbement ou destruction par les tirs directs de canons allemands).
Le soir du 9 avril, l’avance réalisée forme, entre Souchez et Croisilles, une poche allongée de 2 kilomètres de profondeur en moyenne, sauf au centre, à l’est d’Arras, où elle atteint près de 6 kilomètres. Au nord de la Scarpe, la presque totalité des objectifs sont atteints, la crête de Vimy notamment ; il reste au sud à enlever les collines de Monchy-le-Preux.
Le premier jour, les Britanniques y ont fait 5 600 prisonniers et se sont emparés de 35 canons devant Monchy-le-Preux. La progression continue les jours suivants, mais plus lente, car elle est fortement gênée par les chutes de neige et les rafales de vent et de pluie.
Monchy-le-Preux est pris le 11 avril. Le village n’est plus qu’un amas de ruines, complètement détruit par l’artillerie des deux camps. Le lendemain, l’aile droite de la IIIe armée enlève Héninel et Wancourt, d’où elle opère sa jonction, au sud du ruisseau de Cojeul, avec la Ve armée qui attaque sur Bullecourt.
Succès locaux non exploités
Dès le 13 avril, l’ennemi cesse ses contre-attaques au nord de la Scarpe et esquisse un mouvement de repli. Les forces britanniques en profitent pour occuper Bailleul-Sir-Berthoult, Willerval, Vimy, Givenchy et Liévin.
Au sud, les combats continuent : les Anglais prennent la Tour de Wancourt, et s’avancent, le 14, sur la Sensée jusqu’aux abords de Fontaine-lès-Croisilles.
Dans le même temps, les Ve et IVe armées exercent une pression frontale sur la ligne Hindenburg. Elles réussissent à récupérer un certain nombre de villages fortifiés formant les avancées de cette ligne et progressent dans les directions de Cambrai et de Saint-Quentin.
L’ennemi riposte sous la forme d’une violente contre-attaque entre Hermies et Noreuil. Mais après un succès passager, celle-ci est repoussée avec pertes.
Les trois premiers jours de la bataille sont donc un vrai succès pour les Britanniques. Cette avance rapide oblige les Allemands à se replier sur leur 2ième ligne de défense.
Mais avec l’arrivée d’importants renforts le 14 avril, de vigoureuses contre-attaques sont lancées et parviennent à enrayer l’offensive britannique au bout de six semaines. La brèche n’a pu être exploitée et la bataille s’enlise dans des actions locales : à Arleux les 28 et 29 avril, Fresnoy les 3 et 4 mai, Roeux les 13 et 14 mai.
Quatre mille hommes y perdent la vie quotidiennement.
Bilan
Malgré des pertes très importantes, l’armée allemande est parvenue à arrêter l’offensive et à stabiliser le front à une dizaine de kilomètres d’Arras, sur une ligne Gavrelle-Fampoux-Roeux-Monchy-le-Preux, entraînant l’exode de la population civile et la destruction totale des habitations de ces localités.
Arras est libérée de la menace allemande, elle qui se trouvait en première ligne depuis octobre 1914. Mais le bilan est lourd : 100 000 Britanniques manquent à l’appel, chiffre équivalent dans les rangs allemands.
Cependant, ces combats ont permis aux Alliés d’effectuer 20 000 prisonniers, de saisir un important stock d’armes (dont 200 pièces de canon), de permettre le recul de la zone de combat et de désenclaver la ville d’Arras.