Les collines de Notre-Dame de Lorette, qui dominent d’une centaine de mètres toute la plaine de la Gohelle, ont toujours été une hauteur stratégique que les deux armées se sont âprement disputée depuis le début de la guerre.
Lorette, un enjeu stratégique
En octobre 1914, les Allemands s’en emparent. Les Français parviennent à la reprendre dans la nuit du 10 au 11 octobre, mais les Allemands la récupèrent à leur tour le 4 novembre.
À la mi-novembre, ces derniers continuent d’occuper la chapelle de Lorette. Les Français, de leur côté, cherchent à en rapprocher leurs tranchées. Ils réussissent à amorcer une deuxième ligne de tranchées et une voie pour le ravitaillement en munitions.
Au 15 décembre, sous le feu croisé des deux artilleries, le plateau de Lorette est devenu à peu près inhabitable. La chapelle est en ruines, mais l’ennemi n’en a pas moins organisé un vrai réduit sous ses débris. Côté français, deux offensives sont lancées, qui permettent de conquérir des tranchées de première ligne ennemies.
Un hiver froid et humide oblige cependant les deux camps à se contenter de rendre leurs tranchées imprenables. Le sol étant profondément détrempé, le fond des tranchées n’est plus que boue et les soldats risquent de s’y enliser.
Un plan mûrement réfléchi
Au printemps 1915, Joffre prépare une offensive de grande ampleur en Artois.
Les Allemands, sûrs de la solidité de leurs lignes de défense, ont transféré des divisions du front ouest sur le front est. Les Français font monter en ligne cinq nouvelles divisions d’infanterie et des renforts sont envoyés au nord d’Arras.
Programmée au début du mois de mai, cette offensive doit expérimenter la nouvelle doctrine de l’état-major : "la percée par attaque brusquée". Son plan a été élaboré par Foch et prévoit une double opération :
- la principale menée par les Français sur les hauteurs de Lorette et de Vimy,
- ainsi qu’ une secondaire conduite par les Anglais sur le secteur de Festubert.
Joffre donne son approbation le 24 mars.
C’est ainsi que l’attaque est lancée le 9 mai sur le front de l’Artois, après une préparation d’artillerie conduite de manière méthodique : l’armée française aligne un millier de pièces d’artillerie et les bombardements durent pendant six jours et six nuits sans interruption.
Les combats les plus âpres se déroulent dans les villages proches de Lorette : Neuville-Saint-Vaast (dont le 20e corps prend le hameau de la Targette), Carency et Ablain-Saint-Nazaire ; c’est le 33e corps qui est chargé de l’offensive, sous le commandement du général Pétain.
Dès six heures, le bombardement commence et s’accroît en intensité en milieu de matinée. En fin de journée, les combats ont permis d’avancer sur les lignes adverses et de faire des centaines de prisonniers allemands. À Carency, les fantassins ont réussi à franchir trois lignes de tranchées et à pénétrer dans le village.
L’attaque du 9 mai est également lancée pour reconquérir le massif de Lorette. Les pentes nord de ce promontoire sont relativement douces, au contraire des pentes sud, très escarpées. À six heures, l’artillerie lourde se met en action, puis les canons de tranchées. À neuf heures, tout le champ de bataille, de Loos-en-Gohelle à Arras, est perdu dans le bruit et la fumée. L’artillerie adverse riposte avec énergie. Les unités françaises de premières lignes réussissent à franchir les parapets. Une partie progresse vers le Fond de Buval et une autre gagne du terrain sur la droite. À douze heures, trois lignes de tranchées ont été enlevées au prix de lourds sacrifices.
Cette journée du 9 mai 1915 a permis de regagner du terrain sur les tranchées ennemies, mais elle a également fait des centaines de blessés et de tués dans les deux camps. Elle n’est que le premier jour d’une bataille qui sera désignée comme la deuxième bataille de l’Artois et qui durera jusqu’au 19 juin 1915.