Fermeture du centre Georges-Besnier jusqu'à nouvel ordre
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La deuxième bataille d’Artois (du 9 mai au 19 juin 1915) avait deux objectifs : expérimenter la nouvelle doctrine de l’état-major, "la percée par attaque brusquée", et prévoir une double opération, la principale, menée par les Français sur les hauteurs de Lorette et de Vimy, la secondaire, conduite par les Anglais sur le secteur de Festubert.
À l’issue de cette bataille, le concept de percée est abandonné. Désormais, les objectifs seront limités et les attaques seront précédées de grosses préparations d’artillerie en profondeur et accompagnées de tirs nourris d’appui au plus près.
Vers une troisième bataille d'Artois
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Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 090/09.
Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 090/09.
La troisième bataille d’Artois se déroule du 15 septembre au 13 octobre 1915. Elle oppose la Xe armée française, soutenue par 6 divisions britanniques, à la VIe armée allemande.
En effet, les désastres meurtriers du printemps 1915 n’ont pas refroidi l’ardeur agressive de Joffre, qui, lors d’une nouvelle conférence franco-britannique tenue à Chantilly le 7 juillet, propose d’entreprendre une offensive générale à l’automne afin de profiter d’un rapport de forces qu’il juge à nouveau très favorable. Une fois de plus, la Champagne et l’Artois sont les champs de bataille retenus.
Le 8 juillet, les conditions de l’offensive sont soumises à Foch, qui décide de monter l’opération principale en Champagne et de l’accompagner d’une action secondaire en Artois, ce qui permettra de retenir les divisions ennemies qui y sont déployées. Les plans d’attaque sont validés par Joffre dès le 12 juillet, trois semaines seulement après l’échec cuisant de la seconde bataille d’Artois. Le groupe d’armées du Nord (général Foch) attaquera dans la région d’Arras en liaison avec les Anglais et les Belges, le groupe d’armées du Centre devra conduire l’attaque principale en Champagne.
Le Maréchal Joffre écrira dans ses mémoires :
J’ai dit que la principale leçon que j’avais retirée de la bataille d’Artois [la deuxième] qui venait de finir était l’utilité qu’il y avait à entreprendre des actions simultanées de plusieurs armées pour empêcher l’ennemi de déplacer ses réserves et l’obliger à accepter la bataille avec des moyens limités, là où nous voulions la lui imposer.
Le nombre des grandes unités à ma disposition allait constamment en croissant. L’amélioration des organisations défensives et l’attitude passive adoptée par l’adversaire sur la plus grande partie de notre front permettraient de réduire de plus en plus les effectifs immobilisés en première ligne. L’arrivée progressive de nouveaux renforts anglais libérait des unités françaises. L’emploi de plus en plus étendu des troupes territoriales dans les secteurs calmes permettait de relever, de reposer et d’instruire en vue des attaques un nombre toujours plus grand de troupes actives. Enfin, la création de quinze divisions nouvelles améliorait l’articulation de nos forces et leur emploi en vue de la manœuvre (c’étaient les divisions de la série 120 à 129, les 10e, 15e et 16e divisions coloniales et les 130e et 131e divisions d’infanterie).
J’ai indiqué plus haut que notre matériel se développait, moins vite que je ne l’eusse souhaité, mais cependant dans une mesure appréciable. L’artillerie de tranchée en particulier commençait à devenir puissante par le nombre de ses batteries en service et par l’instruction de son personnel... Et si la fabrication des munitions était encore loin d’atteindre les chiffres que j’avais demandés, j’obtins par le décret du 5 août 1915 la mise à ma disposition des très importantes ressources des places fortes en matériel d’artillerie lourde, en approvisionnements de munitions et en personnel de batteries à pied.
Ce développement de nos moyens me permit d’adopter le plan général suivant : rechercher la rupture des organisations défensives sur une partie du front, en Champagne, pendant que les forces ennemies seraient fixées dans la région d’Arras par une attaque secondaire combinée avec une offensive britannique.
Préparation de l'offensive côté français
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Cote 140. Boyau Kiel. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 076/12.
Cote 140. Boyau Kiel. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Num 01 076/12.
L’offensive franco-britannique en Artois est dirigée par le général Foch et s’étend sur 32 kilomètres de front, tenus par la VIe armée allemande, entre La Bassée et Arras. Elle doit se produire de façon simultanée avec l’attaque majeure menée par l’armée française en Champagne.
Le plan d’attaque est extrêmement simple : il consiste d’abord à écraser les positions ennemies par quatre jours de bombardements ininterrompus, avec un final apocalyptique de quatre heures juste avant que l’infanterie ne sorte des tranchées. L’assaut doit être massif et continu, les réserves ayant cette fois été acheminées au plus près du front. La Xe armée, chargée de l’offensive en Artois, recherchera la rupture du front ennemi ou tout au moins la conquête de la fameuse crête 119 – 140.
Pour donner néanmoins à cette action des chances de succès, on cherche à la renforcer, à l’élargir, à la "rajeunir", selon l’expression de Foch, par trois moyens différents :
enfin des approvisionnements considérables en munitions d’artillerie lourde.
L’ordre d’opérations, confié au 33e corps d’armée du général Fayolle, donne pour mission de prendre la cote 140. La 77e division d’infanterie du général Pillot doit enlever Souchez, franchir le ravin des Écouloirs et gravir la falaise, aidée par la 70e division d’infanterie du général Nadaud. Au nord de Souchez, le 21e corps d’armée du général Maistre attaquera sur la pente ouest du plateau de Lorette en direction d’Angres. Au sud, le 3e corps d’armée, partant de Neuville-Saint-Vaast, devra s’emparer de la cote 140 et de la ferme de la Folie. Le jour de l’attaque, le 25 septembre, la Xe armée comprend 18 divisions, appuyées par 380 pièces de gros calibre disposant de 268 000 obus.
Les allemands occupent fermement le terrain
De leur côté, les Allemands, depuis la fin de la deuxième bataille d’Artois, ont activement travaillé au perfectionnement de leurs organisations défensives devant le secteur de la Xe armée. Au nord d’Arras, leur première position est constituée par deux lignes de défense. Ils ont donné à cet ensemble une profondeur telle, qu’au sud de la Folie la deuxième ligne peut difficilement être battue en même temps que la première par l’artillerie de campagne : elle a donc la valeur d’une véritable deuxième position.
Chacune de ces deux lignes a été renforcée de distance en distance par de solides points d’appui. Le terrain qui s’étend entre les deux lignes présente un véritable lacis de tranchées intermédiaires et de boyaux. Plus en arrière, les Allemands ont organisé une deuxième position s’appuyant sur les localités d’Avion, de Vimy et de Farbus.
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Ce qu'il faut savoir de Notre-Dame de Lorette. Aide-mémoire à l'usage des gardes d'honneur de Notre-Dame de Lorette, des pèlerins et des visiteurs avec plan du champ de bataille en cinq couleurs. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHA 883/4 bis.
La colline de Lorette, qui culmine à 165 mètres d’altitude et domine le bassin minier, est une position stratégique. Flanquée d’éperons entrecoupés de ravins aux pentes de plus de 20 %, elle rend toute visée offensive extrêmement périlleuse. La discordance entre les objectifs militaires et la difficulté du terrain ne peut manquer de frapper. On voit loin, on commande court, on meurt sur place
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Ce qu'il faut savoir de Notre-Dame de Lorette. Aide-mémoire à l'usage des gardes d'honneur de Notre-Dame de Lorette, des pèlerins et des visiteurs avec plan du champ de bataille en cinq couleurs. Archives départementales du Pas-de-Calais, BHA 883/4 bis.
Au sud d’Arras, leur première position semble moins forte qu’au nord et ne se compose que de deux lignes de tranchées très rapprochées, mais en partie en contre-pente et flanquées par les deux puissants bastions de Beaurains et de Ficheux. Dans cette région, ils ont de plus ébauché une deuxième position jalonnée par les villages de Neuville-Vitasse, Mercatel et Hendecourt.
Début de l'offensive le 25 septembre
Le 25 septembre, en même temps que l’offensive principale en Champagne, l’attaque d’infanterie se déclenche à 12 h 25.
À l’instant prévu, les soldats français s’élancent hors des tranchées sur tout le front. Quant aux Anglais, ils ont entamé l’action dès 6 h 30 après une émission de gaz de quarante minutes. À 13 heures, commence une pluie qui dure presque toute la journée, rendant très pénible la progression en terrain libre et particulièrement difficiles les mouvements dans les boyaux remplis de boue. En fin de journée, les résultats sont très inégaux.
La 43e division d’infanterie enlève l’ouvrage de la route d’Arras mais se trouve accrochée au bois en Hache, qu’elle finit par emporter.
La 13e division d’infanterie s’empare de la halte de Souchez et de la partie nord du village, puis la 26e brigade, composée du 21e et du 109e régiment d’infanterie, pousse sur les pentes de Givenchy.
La 70e division d’infanterie enlève de haute lutte le château du Carieul et la station toute proche puis la pente sud de Souchez, avant de s’engager vers le bois de Givenchy, en coordonnant son action avec la 13e division d’infanterie.
La 77e division d’infanterie reprend le cimetière de Souchez, les ruines du Cabaret rouge, gagne le Ravin des Écouloirs et aborde la pente de la cote 140.
Les deux divisions du 33e corps d’armée parviennent à prendre pied sur la cote 140 et dans les vergers de la ferme de la Folie. Pris à revers par les défenseurs que, dans leur fougue, ils ont omis de neutraliser, ils sont, comme la seconde vague d’assaut, cloués au sol par des tirs de barrage effectués par des batteries dissimulées à contre-pente de la cote 140. Bientôt, une contre-attaque les contraint au repli.
Sur toute la ligne, les troupes sont accueillies par des feux terribles de mitrailleuses, en même temps que l’ennemi exécute un violent tir de barrage d’artillerie lourde. De plus, les soldats se heurtent presque partout à des réseaux intacts ou incomplètement détruits. Le 21e corps annonce le 26 au matin plus de 350 prisonniers.
Le 26 septembre : poursuite des combats
Le 26 septembre, au début de l’après-midi, les attaques recommencent au nord d’Arras sur tout le front. Au 21e corps, la 43e division reprend la partie ouest du bois en Hache ; sa gauche est arrêtée par des feux de flanc partant de la région d’Angres.
La 13e division franchit la Souchez, gravit les premières pentes sur la rive droite et atteint les abords de l’ouvrage de la Déroute, à la corne sud du bois de Givenchy.
Au 33e corps, la 70e division enlève Souchez et débouche à l’est du village. Ce village, enfoncé dans une cuvette humide et verte, et son bastion avancé, le château du Carieul, sont fortement défendus. Par des travaux de dérivation du ruisseau de Carency, les Allemands ont transformé le bas-fond en un marais infranchissable ; les batteries installées à Angres prennent, au nord, le vallon en enfilade.
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Guerre de 1915 - Batterie d'artillerie française de 75 en action sur le front aux environs d'Arras. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Fi 041/890.
Guerre de 1915 - Batterie d'artillerie française de 75 en action sur le front aux environs d'Arras. Archives départementales du Pas-de-Calais, 5 Fi 041/890.
Dans le parc du château du Carieul, se succèdent une ligne d’abris, puis une grande douve de cinq mètres de large ; en arrière, un amas de ruines hérissé de mitrailleuses ; au-delà du château, un bois offrant un fouillis de troncs, d’arbustes, d’abattis, sur un sol marécageux, semé de fondrières. Pour faire tomber cet obstacle, les sapeurs doivent jeter sur les douves des passerelles pliantes, auxquelles on ajoute des troncs d’arbres pour faciliter le passage des fantassins. Par endroits, les troupes d’attaque enfoncent dans l’eau jusqu’aux genoux.
Le soir du deuxième jour, l’ensemble est pris. Souchez n’est plus qu’un amas de ruines. La 77e division, qui a été chassée du cimetière à la fin de la nuit du 25 au 26, le réoccupe et progresse au-delà en faisant de nombreux prisonniers, mais la 55e division ne gagne que très peu de terrain.
Les attaques des 5e et 6e divisions dans l’après-midi et la soirée du 26 contre la cote 140 et la ferme de la Folie échouent.
Depuis le début de son attaque jusqu’à la soirée du 26, la Xe armée annonce plus de 1 400 prisonniers.
Et après ?
Le 28 septembre, après entente entre le général Foch et le maréchal French, il est convenu que tout le 9e corps relèvera l’aile droite anglaise dans le secteur de Loos. C’est aussi le 28 que la droite du 33e corps et la gauche du 3e, arrêtées jusqu’alors devant la première ligne allemande, atteignent les abords immédiats de la cote 140, sans pouvoir toutefois s’en emparer.
La 55e division (33e corps) et la 6e division (3e corps), qui n’ont obtenu jusque-là que des résultats insignifiants, voient l’ennemi plier devant elles. La 55e enlève le bois des Écouloirs et gagne du terrain à l’est ; la 6e fait des progrès sensibles au-delà de la cote 123 et des Cinq-Chemins dans la direction de la cote 140.
Après cinq jours de combats acharnés, la Xe armée française a fait environ 2 000 prisonniers et les Alliés 3 000. Les troupes ont en outre enlevé une trentaine de mitrailleuses et une vingtaine de lance-bombes, ainsi que vingt-six canons pour la 1ère armée britannique.
Les pertes du 25 au 30 septembre 1915 s’élèvent à environ 978 officiers et 35 758 hommes de troupe, pour la seule armée française.
Bibliographie
Les armées françaises dans la Grande Guerre, tome III, Imprimerie nationale, Paris, 1923, BHB 571/19 ;
Y. LE MANER, La Grande Guerre dans le Nord-Pas-de-Calais 1914-1918, Lille, 2014, Archives départementales du Pas-de-Calais, BHD 190 ;