Les origines de l’édifice
Largement évoquée dans les œuvres de Georges Bernanos, le village de Fressin témoigne encore aujourd’hui de la richesse de son passé.
On ne sait que peu de choses de l'église Saint-Martin primitive si ce n'est qu'elle existe et que c'est contre son chœur qu'est bâtie la chapelle seigneuriale en 1425. Vers 1430, le chœur de l'église est rebâti et petit à petit c'est toute l'ancienne église qui est reconstruite. Il faut attendre la période de 1473 à 1518 pour que la nef, ses collatéraux et le portail Sud soient érigés à l’initiative de François de Créquy qui employa vraisemblablement le même maître d’œuvre qu’à Douriez. Au Nord et à l'Est, la nef a conservé des archivoltes sculptées en accolade aux motifs de feuillage, d'animaux fantastiques et de personnages religieux et profanes venant souligner les grandes arcades et l'arc triomphal. Les arcades et les voûtes des bas-côtés retombent sur de petits dais ou des culs-de-lampe sculptés, héritage de l’architecture gothique. Le portail Sud s’ouvre sur un haut tympan ajouré à remplage flamboyant.
Le chœur est plus bas et plus sobre que la nef et flanqué d’une chapelle seigneuriale. Partie la plus ancienne de l’édifice, cet ensemble est voûté sur croisée d’ogives. La chapelle seigneuriale conserve les vestiges des dais flamboyants qui surmontaient autrefois les stalles de la famille des Créquy ainsi que l’arcade surbaissée, qui permettait à la famille de suivre les offices. Cette arcade sert aujourd’hui d’enfeu au tombeau en pierre noire de Jean IV de Créquy et de Jeanne de Roye. Ce monument funéraire est classé au titre des objets le 5 décembre 1908.
En 1525, un incendie ravage tout le village de Fressin et provoque l’écroulement partiel de la nef et du collatéral Sud. L’église est restaurée en 1530 mais revoûtée seulement en 1690. La Révolution passée, l’édifice présente de fortes dégradations au 19e. L’abbé Bonhomme lance ainsi une grande campagne de restauration de 1854 à 1865.
La principale caractéristique de l'église Saint-Martin est d'avoir été entièrement financée par cette unique famille de Créquy en l'espace de 200 ans, fait extrêmement rare dans nos régions rurales où la nef est le plus souvent à la charge de la paroisse et des fidèles. Cet édifice, avec la collégiale de Douriez, demeure l'un des fleurons des églises de style gothique flamboyant du Pas-de-Calais malgré ces mutilations répétées.
Une restauration en plusieurs étapes
En 1978, Charles Waldschmidt, Architecte en chef des Monuments Historiques, restaure les couvertures et répare certaines maçonneries. De fortes craintes sur la stabilité de la façade occidentale induisent une mise sous surveillance de tout l'édifice. De 1981 à 1984, l’Architecte en chef des Monuments Historiques Etienne Poncelet, entame une première campagne de restauration des contreforts et des maçonneries du bras du transept Sud et de la partie Sud du chevet. En 2011, une dégradation importante est constatée au niveau des contreforts du mur gouttereau Nord de la nef et du chevet. De plus, les fissures verticales des murs intérieurs, alors sous surveillance, ne cessent d’évoluer. Par conséquent, Catherine Madoni, Architecte des Bâtiments de France, engage alors la restauration des contreforts et une reprise partielle des couvertures. L’opération programmée par l’Etat est soutenue par le Département.
Restauration au titre des objets : L’horloge du 19e siècle
De cette histoire mouvementée, l’édifice conserve un trésor impressionnant de 70 objets protégés (boiseries, chaire, monuments funéraires, statues, tableaux…). Le 19e siècle contribue à une certaine modernité de l’édifice. Ainsi l’église Saint-Martin possède dans le comble de la nef une horloge bien particulière placée dans le clocher en 1876 lors de sa première grande restauration.
Elle a été construite par Monsieur Amédée Borrel, alors chronométrier à Paris, qui crée un dispositif de minuterie dit « à coup de vent » pour amortir automatiquement et sans secousse, l'action du vent sur les aiguilles. Pour la petite histoire, il construisit également l'horloge de la cathédrale d'Utrecht aux Pays-Bas et celle de la célèbre université de Coimbra au Portugal. L’horloge fut offerte par de nombreux donateurs. Leurs noms figurent sur une plaque en cuivre, en bas de l’horloge. Son installation dans une armoire en bois dans les combles de la nef en fait une particularité patrimoniale intéressante liée à l’histoire de l’édifice. L’horloge restaurée en 2018, conservée en place dans les combles, est inscrite au titre des objets Monuments Historiques le 13 novembre 2018.