À l’occasion de la numérisation et de la mise en ligne du fonds Durant (coté 44 Fi), nous sommes allés chercher dans nos archives un article relatif à ce fonds, "Dessins d'une famille d'artisans d'art du Montreuillois". Rédigé par Patrick Wintrebert, ancien responsable iconographique aux archives départementales, cet article est paru dans le n° 37 d’Histoire et Mémoire (premier trimestre 2004).
Pour l’accompagner, un carrousel vous propose un bref aperçu de ces beaux dessins de mobilier néogothique et de décors sculptés d’églises.
Une entreprise modeste au service du clergé
Jean-Baptiste Durant est né à Recques-sur-Course le 17 octobre 1835, d’un père ménager. Formé vraisemblablement auprès d’un artisan local, il ouvre en 1860 dans son village natal un atelier qu’il transfère vingt ans plus tard à Jumel, hameau de Beaurainville.
La production est rapidement dominée par le mobilier religieux. Durant profite du marché créé par la grande vague de reconstruction et de rénovation des églises lancée, pour ce qui est du diocèse, par Mgr Parisis dans les années 1850. Autels et retables, confessionnaux, chaires à prêcher, stalles et lambris constituent les spécialités de l’entreprise et ornent encore une trentaine d’églises de l’arrondissement, telles celles de Brimeux, Maresquel et Montcavrel pour ne citer que les plus richement meublées. La mort de Jean-Baptiste le 31 octobre 1913 met un terme à l’activité.
Le contenu du fonds
Le fonds se compose d’un album de 52 feuillets dessinés sur le recto et le verso, et de 108 planches de formats variés. Exécutés indifféremment au crayon, à la plume rehaussée au lavis ou encore parfois en fusain, les dessins consistent principalement en des projets de mobilier et des études pour le décor : figures, scènes bibliques et motifs végétaux.
On y trouve aussi des œuvres personnelles, notamment des portraits de famille et une belle série de planches aquarellées représentant des églises de l’arrondissement.
Si la majorité des dessins et les mieux exécutés sont de la main de Jean-Baptiste Durant, on relève aussi les signatures d’Émile Bard, employé dans les années 1870, et celles des deux fils de l’artisan, Edmond (1867-1903) et Amédée (né en 1875), qui furent associés aux travaux de l’atelier.
L’intérêt du fond
À défaut de posséder les archives de l’atelier, les dessins renseignent sur la localisation des œuvres, les dates de réalisation, la conception et même le processus de fabrication.
De nombreux projets de mobilier sont des documents contractuels, comportant le descriptif, le coût et la signature du client.
Ils éclairent aussi sur les sources d’inspiration. Ainsi apprend-on que les Vertus théologales de la chaire de l’église d’Estréelles sont tirées des médaillons [de la cathédrale] d’Amiens, grand portail de Notre-Dame
(44 Fi 103), ou encore que la scène de la Remise des clés à Saint-Pierre est une copie d’ancienne vignette
gravée d’après le tableau peint par Rubens en 1613 (44 Fi 87).
On soulignera aussi la référence à l’Abécédaire ou rudiments d’archéologie d’Arcisse de Caumont qui fut, jusqu’aux travaux scientifiques de Viollet-le-Duc, l’ouvrage de référence des archéologues.