Projet de préfecture souterraine

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Département du Pas-de-Calais
Étude d’une préfecture souterraine

Le système constructif de la Préfecture du Pas-de-Calais
ne présentant, en cas de guerre, aucune sécurité en face
des bombardements par obus ou des incendies, le seul moyen
pour assurer la continuation des services dont le fonctionne-
ment resterait indispensable à ARRAS serait de créer une
préfecture souterraine, sorte d’abri profond construit pour
résister aux bombardements les plus terribles et aménagé à
l’intérieur, en plusieurs étages au besoin, pour permettre
au Personnel de vivre et de travailler dans des conditions
possibles.

Ce projet ne constituerait pas seulement un refuge
momentané au moment d’une émission de gaz ou de bombardement
par obus, mais une véritable organisation souterraine où
les occupants pourraient travailler, se nourrir et coucher.
Un tel projet nécessite une étude approfondie tant au point
de vue de la résistance, qu’en ce qui concerne les aménage-
ments intérieurs. Il ne faut donc voir dans cet avant-projet
qu’une suggestion susceptible d’être retenue.

L’emplacement qui paraît le mieux situé pour répondre
à ce programme est dans le parc de la Préfecture, dans un [...]

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[...] espace libre laissé à la disposition des Huissiers de la
Préfecture. Cet emplacement, d’un accès facile, permettrait
la construction d’un abri profond, capable de résister à
tous les bombardements. Établi aux Archives actuelles, il
bénéficierait en premier lieu de la présence de ce haut corps
de bâtiment construit en B. A. sur 20 m de hauteur avec cinq
planchers successifs et des étages remplis de papiers contenus
dans des dossiers bourrés. Un tel bâtiment ne peut que cons-
tituer, par sa seule structure, un écran très efficace, les
obus tombant la plupart du temps – que ce soit par avions ou
par canons – avec un angle qui peut dépasser 45° ; en outre,
cette proximité permet de se servir du sous-sol du bâtiment
des Archives déjà aménagé contre les gaz ; des escaliers par-
tiraient de ce sous-sol pour conduire soit à l’abri profond,
soit au dehors ainsi que l’indique le croquis joint à ce
rapport.

Il existe également un autre intérêt à établir cet
abri à proximité de ce grand bâtiment de 20 m de hauteur : la
ventilation qui peut alors aboutir dans la partie haute
des archives au lieu de se faire à la surface du sol, et si
l’on observe que ce bâtiment est placé lui-même sur une
hauteur, on conviendra qu’il faudrait une émission de gaz
d’une abondance terrifiante pour atteindre en ce lieu plus
de 20 m de hauteur ; ce serait dans les autres parties de
la Ville un anéantissement complet.

Les croquis joints à cet exposé succinct montrent la [...]

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[...] disposition ci-dessus exposée où les avantages signalés
apparaissent plus clairement dans la position de l’abri
par rapport aux Archives.

Bien entendu, les précautions d’usage ont été prévues
pour ne pas risquer de causer des dommages aux fondations
des archives, ce bâtiment est construit sur un radier en B. A.
avec semelles débordantes de 0.50 extérieurement et l’esca-
lier conduisant à l’abri est séparé de 1.50 des archives,
espacement largement suffisant si l’on tient compte de la
nature du sous-sol où la craie compacte apparaît à 2.25 de
profondeur sur une épaisseur indéterminée.

La présence du sous-sol des Archives à 1.00 de pro-
fondeur au-dessous du niveau du sol pourrait servir de
secours et les escaliers conduisant à l’abri souterrain com-
muniqueraient également avec les sous-sols des archives,
soit directement, soit indirectement.

L’examen de l’avant-projet montre que les dispositions
prises dans des constructions identiques ont été respectées,
portes avec sas, disposition de portes en chicanes pour qu’en
cas de bombardement, l’effet soit limité.

Au point de vue constructif, l’abri serait constitué
par une dalle de B. A. de 2.00 épaisseur avec 0.25 de terre
végétale au-dessus. Le ciment dosé à 450 K° par m³ de sable
avec à l’intérieur, des réseaux de fil d’acier formant
treillage, barres de 14 mm espacées tous les 0.20 ; 6 réseaux
analogues étant prévus dans l’épaisseur de la dalle cons-
titueraient un plafond pouvant résister aux engins modernes
les plus puissants.

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Cette couverture en terrasse empiéterait sur toutes
les faces pour protéger les côtés suivant les indications
présentées en coupe. Il y a lieu de constater que la présence
de craie compacte augmente la protection de l’abri sur tous
les côtés. L’on peut, dans ces conditions affirmer que des
services installés dans un semblable souterrain pourra fonc-
tionner dans des conditions normales.

Installations intérieures
Les installations intérieures seraient réparties
en deux étages :

Étage principal : À cet étage, immédiatement situé au-dessous
de la plate-forme en B. A. de 2 m d’épaisseur, seraient dis-
posées des pièces pouvant abriter 40 employés avec 3 bureaux
centraux situés au milieu de l’abri.

Un vestibule, où se tiendrait l’huissier de service –
qui pourrait s’occuper des services du courrier – servirait
de communication entre les différentes pièces dont la répar-
tition et l’installation seraient étudiées ultérieurement.

Un branchement serait fait pour relier directement
le téléphone avec l’extérieur ; deux lignes pourraient être
ainsi installées, les pièces de travail étant reliées par des
sonneries permettant les appels des employés.

L’éclairage serait assuré par le groupe installé au
sol de l’Hôtel de la Préfecture au moyen d’un câble armé
passant dans le sol du parc de l’Hôtel.

Enfin une ventilation et une épuration de l’air des
différents locaux seraient aménagées par un système de filtres [...]

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[...] inspiré de ceux déjà réalisés dans les abris de même nature
et deux gaines seraient aménagées verticalement à l’inté-
rieur du bâtiment des archives, aboutissant sur la terrasse
où elles aspireraient un air sain distribué dans l’abri par des moyens mécaniques.

Sous-sol : Au-dessous de cet étage, un deuxième abri de
même surface serait aménagé pour assurer le couchage du
Personnel dans des conditions sommaires.

Un forage serait percé au sol de cet étage ; d’après
les indications recueillies, l’eau potable pourrait être
trouvée en abondance à environ 30 m de profondeur ; une
pompe centrifuge, à corps de pompe noyé pour éviter tout
entretien, refoulerait l’eau potable dans un réservoir sous
pression.

Les eaux usées des WC, lavabos et cuisine seraient
absorbées par un puits perdu construit en même temps que
l’abri.

Un réfectoire serait aménagé dans une pièce ainsi qu’une
cuisine installée sommairement pour permettre de vivre
dans cet abri sans sortir au dehors.

Une pièce serait également réservée pour les filtres,
organe important qui doit assurer le renouvellement de
l’air et qui même, dans certains cas de bombardements par
obus à gaz toxiques, provoquer une suppression de l’air ainsi
que cela existe dans les organisations de la ligne Maginot.

Les différents organes de cette installation seraient [...]

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[...] protégées par des portes en fer construites par des spécia-
listes avec calfeutrements adaptés pour résister aux chocs
et aux pressions.

Cette étude sommaire n’a pas d’autre but que celui
d’indiquer dans quel sens pourrait être envisagé la création
d’une véritable préfecture souterraine, à effectif réduit
bien entendu, mais susceptible néanmoins d’assurer les servi-
ces indispensables pendant la guerre, quelles que soient
la puissance et la nature des bombardements.

Un projet de cette nature exige une mise au point très
détaillée et bien étudiée ; l’étude serait poursuivie dès
que le principe de cette création serait décidé par le
Conseil Général.

Il est impossible de fixer le coût d’une semblable
installation, mais il semble, d’après les abris déjà réalisés
dans le même esprit, qu’une somme de Deux millions serait
indispensable pour la réalisation d’un projet de l’importance
de celui dont les lignes sont exposées dans le présent
rapport.

Arras, le 28 octobre 1938
L’architecte en chef du département,

Decaux