Le 3 janvier 1918, le dessinateur Peronat signe un petit croquis représentant le beffroi d'Arras en ruine, sous-titré "Chez nous". Il s’agit en réalité du nouveau bandeau d’une rubrique du Lion d’Arras, utilisé du 9 mai au 29 août 1918 (la rubrique existe depuis le 5 juin 1916).
Si l’on ne dispose pas d’informations sur cet auteur (juste la mention "un de nos collaborateurs du génie" apposée sur un dessin du 20 juin 1918), nous en savons en revanche davantage sur la provenance de ce document.
Il est tiré des archives Aymé-Guerrin (concernant le Lion d’Arras) qui ont été confiées aux archives départementales du Pas-de-Calais en avril 2017, par Charles Guerrin, fils d'Aymé Guerrin.
Aymé Guerrin
Lui-même fils d’Eugène Guerrin, un industriel arrageois, et de Jeanne Chauvelot, Aymé Guerrin naît à Ussel le 20 avril 1890. Après des études théologiques en Belgique (collège des Jésuites d’Antoing et internat de Thieu), il demande son admission au noviciat de Florennes qui lui est refusé en raison de sa santé jugée trop fragile. On lui propose alors un poste de professeur au collège Saint-Joseph de Reims.
À l’été 1914, alors qu’il passe des vacances en famille à Arras, la guerre éclate. Bien que réformé, il décide de rester et offre ses services comme infirmier volontaire. Pour cet engagement, il reçoit en 1920 la médaille d’argent de la Reconnaissance française.
Le 1er janvier 1916, il fonde avec Jules Milléquant, curé-doyen de Saint-Nicolas-en-Cité, Le Lion d’Arras, "journal de siège : organe hebdomadaire d’Union atrébate", soutenu financièrement par Eugène Guerrin. Le journal représente la seule fenêtre extérieure pour la population restée dans la ville, cernée par l’ennemi. Le dernier numéro paraît le 1er janvier 1920 : le titre est alors remplacé par Le Beffroi d’Arras, placé sous la direction d’Eugène Guerrin.
Car, après cette première expérience journalistique, Aymé Guerrin décide de reprendre le chemin des ordres. Le 24 octobre 1920, il entre au prieuré trappiste de Latroun où il est admis novice le 26 décembre 1920. Mais sa santé précaire l’oblige une fois de plus à renoncer à ses aspirations religieuses. Il quitte le prieuré le 12 avril 1922.
À partir de cette date, il embrasse totalement la carrière journalistique et collabore à plusieurs titres, comme L’Écho de Paris, Le Petit Marseillais ou encore Le Matin. Le 13 juillet 1925, il épouse Marie-Louise Kuhn avec qui il aura neuf enfants.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il devient résistant et crée le groupement "Vercingétorix", rattaché à "Ceux de la Libération". Animateur du réseau, il crée et rédige une publication clandestine (devenue France-Libre) jusqu’à son départ en 1945. Après-guerre, ce titre devient un grand quotidien parisien avant d’être absorbé par L’Aurore.
Aymé Guerrin poursuit ses activités (conférences, édition, rédaction de chroniques, etc.) jusqu’en 1948, date à laquelle il se retire à Nice. C’est dans cette ville qu’il décède le 2 décembre 1979.
Le fonds Aymé-Guerrin
Malgré sa petite taille – il ne représente que 270 pièces – le fonds Aymé-Guerrin est d’une richesse exceptionnelle pour quiconque s’intéresse au célèbre journal arrageois publié durant la Première Guerre mondiale.
Ce fonds est, en effet, composé :
- d’une part de la collection intégrale, à l’exception des numéros 162 et 164, du périodique Le Lion d’Arras, publié du 1er janvier 1916 au 1er janvier 1920 (cote 110 J 7). Ces deux lacunes sont heureusement comblées par notre propre collection du Lion d’Arras consultable sur notre site internet ;
- d’autre part, d’un ensemble de documents liés à cette publication : de la correspondance (110 J 1), de nombreux dessins et photographies (110 J 2-3), des épreuves d’articles dont certaines ont été censurées (110 J 4-5), et enfin de quelques notes écrites de la main d’Aymé Guerrin.
Ce fonds, qui a entièrement été numérisé, est consultable dans notre salle des inventaires virtuelle.
Accéder au 110 J - Archives Aymé-Guerrin
Signalons qu’à l’exception des documents constituant le fonds 110 J, conservés aux archives départementales du Pas-de-Calais grâce à l’entremise de Michel Beirnaert, l’ensemble des archives relatives aux activités publiques d’Aymé Guerrin ont été confiées aux Archives nationales, où elles seront intégrées à la sous-série 72 AJ, regroupant des archives privées des années 1939-1945.